Le Japon a toujours aimé sortir des engins décalés, souvent avec une technologie innovante et assez osée. Quand ça passait, ça faisait du mal. Mais souvent, ça n’apportait pas grand chose si ce n’est de nouvelles pistes à étudier… ou pas. Et dans le genre voiture décalée, j’vais vous présenter la Hino Samouraï, une caisse? Une caisse sortie des mangas pour se retrouver dans la course !

Hino Samouraï - Made in California ! 1

Au milieu des années 60, pour les japonais, il y a deux courses d’endurance à gagner… Les 24h du Mans et le Grand Prix du Japon. La première jouit déjà d’une notoriété mondiale alors que la seconde est la référence sur le sol japonais, à tel point que les constructeurs étrangers s’y inscrivent pour se payer un coup de pub sur l’archipel. Une victoire y est le signe de succès commercial.

Hino Samouraï - Made in California ! 2

Pete Brock a grandi en Californie. Dès 51, alors qu’il n’a que 15 ans, il se rend à Pebble Beach avec son appareil photo… Il y choppe le virus du sport auto. L’année suivante, il casse sa tirelire et toutes ses économies pour pouvoir s’acheter une MG de 49 qu’il avait repérée alors qu’elle était garée à l’arrière de la boutique où il bossait. A l’époque, il faut attendre ses 21 ans pour avoir le permis de conduire. Cela ne l’empêche pas de la personnaliser pour la repeindre en blanc et bleu qui sont les couleurs de courses internationales des voitures américaines. Une fois ses diplômes d’études secondaires en poche, il rejoint l’université de Stanford pour suivre une formation d’ingénieur qu’il va rapidement abandonner pour passer le concours d’entrée à l’Art Center College of Design de Pasadena. Il se pointe à l’entretien d’admission les mains dans les poches… et quand on lui demande son portfolio, il se retrouve coincé. Alors Pete retourne dans sa voiture, sort un cahier et y dessine plusieurs graf’ de hot rod et custom. Quelques heures plus tard, il retourne à son entretien et présente ses dessins au jury estomaqué. Il est admis !

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Peu de temps après, toujours sans permis, il craque pour une Ford 46 qui, elle aussi, va devenir blanche avec des bandes bleues. mais ce coup ci, il sort la caisse à out’ et greffe un V8 Cadillac à celle qu’il va alors appeler la Fordillac.Il remporte quelques concours custom et se fait repérer par les pontes de General Motors qui lui propose un poste dans son centre de design. Il accepte aussitôt et quitte la Californie pour rejoindre Detroit. Nous sommes en 1956, Pete a seulement 19 ans.

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En novembre 57, Pete Brock va signer un dessin qui sera retenu par Bill Mitchell et deviendra en 1963 la nouvelle Corvette Stingray. Sauf qu’en 1959, Pete a 21 ans, décroche son permis, prend de suite sa licence SCCA et quitte GM pour retourner en Californie chez Max Balchowski qui possède le garage Max Motors à Hollywood.

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Pete coure sur un Cooper en SCCA et commence à côtoyer plusieurs pilotes et préparateurs… Jusqu’à ce jour de 1961 où Carroll Shelby lui propose un job. Il va s’occuper du centre de pilotage, de la pub, du marketing, d’imaginer les livrées des voitures, les logos et de tout merchandising. C’est aussi lui qui va concevoir le kit de la Mustang GT350 ou encore certaines voitures de course comme la Lang Cooper, la Nethercutt Mirage, la De Tomaso  P70 et on lui doit même Shelby Daytona Cobra.

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En décembre 65, Brock quitte Shelby et franchit la dernière étape qu’il lui reste, ouvrir sa propre structure, le Brock Racing Enterprise. Il va alors travailler avec Hino, Datsun, Toyota ou encore Triumph. Voilàààààà, on y arrive !

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Hino, c’est une marque japonaise née en 1942, qui a fabriqué des camions,des half-tracks et des moteurs diesel ! En 53, elle se lance dans l’automobile en assemblant des Renault sous licence. En 61, elle lance sa première berline, la Contessa 900 (Dont la version sportive, la 1300, est imaginée et développée par Pete Brock) ainsi qu’un pick up, le Briska. En fin 67, elle est rachetée par Toyota pendant que sa division de moteurs diesel va être rachetée par Isuzu.

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Mais cette même année, juste avant de rejoindre le géant japonais, Hino avait présenté la Samouraï dont l’objectif est d’aller remporter le GP du Japon et les 24h du Mans. Belles ambitions ! La voiture repose sur un châssis tubulaire habillé d’une carrosserie affutée 100% alu. Brock a innové en intégrant directement à la caisse un aileron que pouvait régler le pilote en fonction de ses besoins de portance.

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En position centrale arrière, on retrouve le 4 cylindres de la Hino Contessa 1300. Gavé par des carbus Mikoni – Solex, il envoie 110 ch aux roues arrière via une boite 5 manuelle. Hormis le moteur, tout va être fait en Californie. Brock s’occupe des plans et dessins. La voiture va ensuite être fabriquée chez Troutman Barnes, une carrossier californien un peu déjanté.

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La voiture fait sensation auprès des foules avant d’être embarquée pour rejoindre le Japon où elle va alors être prise en main par un équipe dirigée par Toshiro Mifune, un acteur japonais ! Sauf que son histoire japonaise va s’arrêter là… A quelques jours du GP du Japon qui va se courir à Fuji, les autorités disqualifient la voiture la jugeant trop basse. Cette disqualification fait polémique, mais rien n’y fait, la Hino Samuraï n’aura pas le droit d’aller affronter la Nissan R380. C’est là qu’Hino est repris par Toyota qui stoppe le programme Samouraï.

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Pourtant la voiture va revenir sur le sol américain et participer une couse sur le circuit de Riverside aux mains d’un certain Terry Hall. Déçu par ses performances, il la revend à Ron Bianchi, un pilote qui décide d’y mettre tout ce qu’il faut pour la faire gagner. Le moteur est modifié, le châssis est revu, tout comme les suspensions et le freinage. Pendant 4 ans, elle va s’imposer dans 25 courses pour emporter deux titres dans sa catégorie. Devenue obsolète et dépassée, Bianchi finit par l’entreposer au fond d’un hangar. La boucle est bouclée quand Pete Brock la rachète. Mais trop occupé entre ses diverses activités et les courses auxquelles il participe, il ne fera pas mieux que l’entreposer à son tour !

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Finalement, elle va une dernière fois repartir au Japon pour rejoindre la collection de Satoshi Ezawa qui va lui offrir enfin la restauration qu’elle mérite. Aujourd’hui, elle sort régulièrement pour participer à quelques rétrospectives et courses historiques. Sacré histoire pour une voiture unique et originale.

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