« Comme un ouragan », l’Audi RS2 Avant débarque sur le marché automobile comme on arriverait en survêt’ Sergio Tacchini à un enterrement. Projet tout droit sorti de l’association Audi/Porsche, on dirait plutôt une idée écrite sur un bout de nappe en papier juste pour déconner finissant la dernière gorgée de whisky coca dans un gobelet en plastique. Le résultat est étonnamment très efficace. Retour sur ce collector qui fera des passionnés de voitures familiales et le début des break de chasse.
Retour dans les années ’90. Quand on voulait une voiture sportive et spacieuse, il fallait se tourner du côté des berlines, bien peu pratique en tri-corps quand il faut ranger les mioches. Du côté des break, on avait le choix entre une Passat VR6 synchro de ’94 à l’allure pataude et peut flatteuse ou une Volvo 850 T5R de ’95 qui commençait à faire parler d’elle avec une puissance plafonnant à 240ch mais avait encore des lignes déjà vieillotes relevant plus du corbillard que de la sportive.
Développées en association avec Porsche, ils n’ont pas lésiné sur les moyens de proclamer leurs participation à ce projet de doux-dingues. Les RS2 partaient de l’usine Audi sans pare-chocs, sans rétros et sans sièges et rejoignaient l’usine Porsche pour préparer la bête. Les rétros de la 993 et les jantes Porsche Cup en 17″ sont bien d’origine ainsi que les étriers de freins rouges à 4 pistons pris sur les 968 Club Sport. « C’est du lard ou du cochon ? Aucune idée, écrase celle de droite on verra après. »
Les magiciens de chez Stuttgart n’ont pas hésité à signer ce croisé « porte et fenêtre » dans le moindre détail quitte à nous hurler au visage que c’est une Audi avec une âme de Porsche. La volonté de faire rejoindre les feux arrières par une bande centrale n’est pas anodin, vous devinerez au second coup d’oeil le style des 911 ou 993 de cette époque.
Rien de fou à l’intérieur, légèrement retouché par Porsche pourtant, les 3 manos devant le levier de vitesse, le compteur gradué jusqu’à 300 km/h à fond blanc et les touches de carbone font à peine la différence entre cette RS2 Avant et une Audi 80 break (qui sert de base pour ce cargo de compétition). On retrouve l’intérieur froid et « tristouné » des allemandes des années ’90.
Le principal attrait de ce modèle est ce qui se cache sous le capot. Le bon vieux 5 cylindres turbo utilisé depuis pas mal d’années par Audi est passé chez Porsche et s’est mis à bouffer de la M3 comme un croco déchiquetterait une pauvre gazelle rachitique. Arbres à cames retaillés, injecteurs gros débit, gestion électronique, collecteur revisité, gros échangeur et un turbo KKK poussé à 1.4 bar en overboost. 315 ch le tout sur 4 roues pour emmener ses gosses à l’école.
D’une ancienne conception, on se délectera du coup de pied au cul qu’elle procurera au dessus de 3000 tr/min, le gros turbo se déclenche comme une vielle R5 Alpine turbo, c’est-à-dire « On/Off ». Une fois la pédale soudée au plancher, il faudra faire attention à pas se faire surprendre, on pourrait arracher le 3/4 arrière de la M3 qu’on veut dépasser sans même sans rendre compte. Le KKK a, en effet, un temps de réponse de 1 à 3 secondes. Une fois liberé, le cervelet en purée, le 5 cylindres vous fera passer la barre des 100 km/h en 5.3″ et vous emmènera à plus de 260 km/h. De quoi se propulser dans la stratosphère, les vélos dans le coffre.
Pour rappel, on est sur un break sorti en ’94 sur base Audi 80, développé avec Porsche. Elle se permet de tutoyer grossièrement des BMW séries 7 V8 et V12 et met des coups de têtes à des Ferrari 348 en étant même plus rapide et plus puissante. Au volant, il faudra faire avec le caractère dépassé du 5 cylindres et bien calculer le moment où vous mettrez plein gaz. On adhère ou pas, en tout cas, la haine coule dans ses veines.