Difficile de trouver une entreprise plus prolifique et éclectique que Matra… Au fil de son histoire compliquée, le groupe Français aura pondu pêle-mêle des monospaces en plastique, des phones pas smart, des vélos électriques ou encore le Magic, un… missile air/air ! Cerise sur le gâteau, au milieu de tout ce capharnaüm, elle a écrit l’une des plus belles pages du sport mécanique Tricolore…

Matra

La marque se lance dans la compétition en 1964 suite à l’acquisition par le groupe des Automobiles René Bonnet. Le petit constructeur de Champigny était connu pour son coupé Djet, rival de l’A110, dont la carrière se poursuivra sous le blason maison. C’est mignon tout ça, mais chez Lagardère on a de grandes ambitions, Matra Sports s’engage donc en Endurance et en F1… Rien que ça !!!

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Sortie en 1967, la MS630 avait pour mission de briller aux 24 Heures du Mans. Succédant à la MS620, dont elle reprend le châssis tubulaire mais dans une version allégée, le petit proto est propulsé par un V8 BRM 2 litres issu de la F1. Habillé d’une carrosserie étudiée en soufflerie mêlant plastique et fibre de verre, le petit proto revendique 260 boulets pour un poids de 735 kg à sec.

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Malgré son rapport poids/puissance impressionnant et sa ligne à couper le souffle, la Matra est ratée. Aux essais du Mans 1967, Jean-Pierre Jaussaud a la désagréable surprise de constater qu’elle est totalement instable à haute vitesse. Les Hunaudières sont un calvaire, le train arrière part dans tous les sens, une vraie mission suicide… Jaussaud ira même jusqu’à qualifier l’auto de « Putain ».

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L’équipe considère les doléances du pilote comme des pleurnicheries de vulgaire Romain Grosjean. L’arrogance des ingénieurs coutera la vie au jeune espoir Roby Weber : dès son premier tour, l’arrière de la MS630 décolle au milieu des Hunaudières. S’ensuit une série de tonneaux à pleine vitesse, l’épave lancée telle un missile termine dans une maison et s’embrase. Son pilote n’y survivra pas, il avait 27 ans.

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Ratée donc… Son palmarès est d’ailleurs quasi-vierge. L’Histoire retiendra des 24 Heures 1968 épiques : longtemps 2ème, l’équipage Pescarolo / Servoz-Gavin abandonne le dimanche en fin de matinée… Oui, et ? Ah, j’avais oublié la météo dantesque et les essuie-glaces HS depuis le départ… Et aussi notre Pesca national qui roulait seul depuis 5h du mat’, son coéquipier ayant déballonné… Perdre avec panache, une tradition Française !

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Bon, mal conçue, dangereuse, palmarès anecdotique… Quel est l’intérêt de cette caisse au final ? Et bien il est double. Historiquement cette caisse est un gros step dans l’aventure Matra. Elle fut la première à recevoir le légendaire V12 maison, sûrement la plus belle et mélodieuse mécanique  jamais produite en France ! Techniquement également, car elle est… Neuve !

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Ce n’est pas une banale réplique… Elle a été construite par EPAF selon les plans originaux et reçoit son propre numéro de châssis Matra : le 05. Mais quel intérêt de construire un proto foireux des 60’s au XXIème siècle ? L’Histoire ! Née de la volonté du Groupe Lagardère, elle a pour mission de remplacer un chainon manquant dans la dynastie des protos tricolores.

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En effet, entre le V8 BRM et le V12, la Matra a connu une autre configuration. La mise au point du moteur maison ayant pris du retard et le petit V8 ne permettant pas de jouer les premiers rôles, elle a embarqué le bloc de la Ford GT40 ! Cinq châssis ont été produits, l’un a été détruit et aucune des MS630 survivantes n’avait cette motorisation.

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La page manquante de la légende a donc été réécrite. Et avec brio puisque la Matra-Ford s’est révélée être redoutable lors des évènements historiques FIA. Un Happy End pour cette auto à l’histoire tragique qui connait enfin le succès plus de 50 ans après sa naissance…

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