La BMW M1 fait aujourd’hui partie de ces engins aussi mythiques que désirables, le genre à figurer dans la wish list des petrolheads. Et celle qui débarque, dopée à l’escargot, elle a poussé le concept jusqu’à ses retranchements. Même si finalement, tout ça ne va pas servir à grand chose…

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BMW et le sport auto, c’est une histoire qui a débuté dans les années 30. Mais c’est au début des 70’s que la marque a ouvert son propre département Motorsport afin de lancer le coupé E9 CS, CSL et CSi dans le grand bain et commencer à collectionner les victoires… jusqu’à ce qu’une certaine Porsche 935 entre en jeu et vienne perturber les plans de la Bayerische Motoren Werke. Même si le coupé E9 avait encore de beau reste, chez BMW Motorsport, on avait déjà commencé à bosser sur sa remplaçante, une GT développée spécifiquement pour le sport auto… si ce n’est que pour pouvoir décrocher le ticket d’entrée, il va falloir en vendre 400 exemplaires routiers… et ça, ce n’était pas prévu puisque le règlement a été modifié en 77 alors que la M1 était encore en plein développement. Bon en même temps, c’est grâce à ça que la route a vu débarquer les plus beaux et impressionnants de ses monstres, des caisses de courses tout juste civilisées… Ferrari 288 GTO, Lancia 037, Ford RS200, CLK GTR, Nissan R390 GT1… et bien d’autres.

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Quoiqu’il en soit, chez BMW, on avait ressorti la BMW Turbo Concept des cartons pour s’en inspirer afin de développer le projet E26, plus connu sous le nom de M1. Et là, ça va devenir une partouze de compétences… Giugiaro – Ital Design – va se charger de revoir le dessin original tracé par Paul Bracq. La coque en fibre viendra ensuite habiller un châssis tubulaire imaginé et produit chez Lamborghini. Enfin chez BMW Motorsport on joue au chef d’orchestre et on se charge de la partie mécanique. D’autant plus que maintenant, il faut en faire 400 versions civiles.

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En octobre 78, elle est dévoilée au salon de Paris. Les lignes sont tendues, fluides, compactes (4m35 x 1m82 sur 1m14), offrant une beauté naturelle qui permettra à la M1 de perdurer à travers les générations sans foncièrement prendre de rides. Même aujourd’hui, si on fait abstraction de ses pop-up, la M1 a su rester subtilement moderne et contemporaine.

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Dessous le châssis spaceframe tubulaire remplit parfaitement son rôle avec le cockpit sobre et classe avec juste derrière, en position centrale arrière, une pièce d’orfèvrerie, le M88, un 6 en ligne de 3453 cm3 24 soupapes à carter sec, gavé par une admission à 6 papillons individuels et une injection mécanique Kugelfischer Bosch. Avec 277 ch et 33,7 Mkg de couple pour 1300 kg, la bestiole filait à 262 km/h après avoir passé les 100 km/h en moins de 6 secondes.

Le problème, c’est que la voiture a couté très cher à développer et encore plus à assembler. Lamborghini en proie à de gros problèmes financiers, c’est Marchese qui va se charger de produire le châssis. La coque en fibre est réalisée chez TIR, un autre spécialiste italien. L’ensemble part ensuite chez Ital Design pour y être assemblé et recevoir l’habitacle. Puis les voitures prennent la direction de Baur afin d’y greffer l’ensemble mécanique avant de se retrouver chez BMW Motorsport pour y être finalisées, testées et validées par le contrôle qualité allemand. Au final, elle se retrouvait au catalogue à un tarif supérieur à celui d’une Lamborghini Countach ou d’une Ferrari 512 BB. On va appeler ça un traumatisme commercial !

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Pour essayer de sauver les meubles, BMW va lancer le Procar, une course monotype en ouverture des GP européens de F1. Il n’aura lieu qu’en 79 et 1980 avant que la BMW M1 ne finisse par être homologuée en Gr.4. Et alors que la M1 avait été imaginée pour courir en Gr.5, les changements de réglementation feront que seulement deux M1 Gr.5 seront finalement produites, la première pour Sauber et la seconde pour March. D’autant plus qu’entre temps, BMW Motorsport a décidé de se lancer en F1 !

Ce qui nous mène à la méchante M1 aux couleurs de Jägermeister qui vous fait de l’oeil depuis le début de cet article. Si vous avez lu mon article sur la M1 Gr.5 de March, alors vous savez déjà que pour des raisons de règlementations, l’écurie anglaise a dû abandonner le M88 Turbo pour le remplacer par un V8 Chevy. Tout est parti de là… puisque l’écurie Walter Brun a été séduite par l’idée d’une M1 Turbo Gr.5 et a réalisé en fait une troisième BMW M1 Gr.5 pour y greffer ce moteur abandonné.

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Mais voilà, en cours de route, le projet a été abandonné, Walter Brun préférant miser sur une Porsche 935. La M1 Turbo Gr.5 n’a jamais été terminée. La voiture, le moteur et un stock phénoménal de pièces a été racheté par Fritz Wagner, un mécanicien de BMW Motorsport, qui a vu à travers lui l’occasion de se débarrasser de tout ce bordel qui prenait de la place pour rien… bien sûr, pour une bouchée de pain. Et 40 ans plus tard, notre a décidé de terminer enfin celle qui avait dû courir au début des 80’s.

Après presque deux ans de boulot, elle a fait ses premiers tours de roues l’année dernière lors d’une épreuve historique. Affichant 1000 ch et 930 Nm pour 1050 kg, elle a impressionné le public avant qu’un souci technique ne lui fasse terminer son show au ralenti. Depuis, Fritz Wagner l’a revendue à un collectionneur qui a la ferme intention de la fiabiliser afin de l’aligner dans des épreuves historiques. Elle aura fini par voir la piste…!

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© Daniel Nikodem pour Classic Driver