Cette De Tomaso P70, c’est l’histoire d’une rencontre. Celle d’Alejandro De Tomaso et de Carroll Shelby. Forcément, après ce genre de rencontre, il ne peut sortir de là qu’une idée conjointe d’aller développer une caisse. Et ça tombait bien puisqu’une nouvelle formule venait de voir le jour. Alors ils y sont allés…
Mais ça n’a pas été si simple que ça… Car si Shelby et De Tomaso avaient des points communs, ils avaient aussi un certain égo qu’il a été compliqué de faire cohabiter. Shelby était pilote et concepteur de voitures de courses. De Tomaso lui spécialisé dans les routières sportives. Tous les deux avaient pour habitude de faire les choses en fonction de leur vision. Sauf que là, Shelby était le client et De Tomaso le fabriquant. Sauf que Shelby voulait que les choses soient faites comme il le voulait lui. Alors que De Tomaso préférait faire les choses à sa façon… Bref, j’vous dis pas le bordel ! Ajoutez à cela les problèmes géographiques et les différences culturelles et vous comprendrez mieux qu’ils aient préféré tout arrêter après un seul exemplaire.
Chez De Tomaso, 2 ans avant, on avait déjà fait la Vallelunga. Et il faut reconnaitre que la caisse était une réussite, aussi bien esthétique que technologique. Châssis avec moteur porteur dans un treillis tubulaire, suspensions indépendantes, barres antiroulis, 4 freins à disque et caisse en fibre de verre. Seul le petit 4 cylindres de la Ford Cortina, un 1.6l et 130 ch décevait les clients qui en auraient voulu plus.
Et c’est de là qu’ils sont partis… Pete Brock, un génial inventeur qui bossait pour Shelby, a récupéré le châssis et lui a collé un bon gros V8. En bon texan, Shelby voulait que ce soit le V8 427 ci (7.0l). Mis à part que même en poussant les murs, il était juste impossible de le faire rentrer. Déçu et loin d’être impressionné, Shelby finit par installer le 289ci (4.7l) au milieu de la P70.
Une fois le châssis assemblé, il devait partir en Italie afin que De Tomaso puisse l’habiller. Afin de veiller au grain, Shelby envoie Brock pour superviser le boulot qui va être réalisé par la Carrozzeria Fantuzzi basée à Modène. Alors qu’il était en plein boulot, il est subitement interrompu par un appel de Carroll qui lui demande de rentrer illico en Californie. Le projet avec De Tomaso est annulé, Shelby vient de signer un contrat exclusif avec Ford pour aller aux 24h du Mans avec celle qui deviendra la GT40. Pete Brock repart, en emportant avec lui le V8 289 Ford Racing !
Furieux, Alejandro De Tomaso décide de terminer le projet et de le rebaptiser Ghia De Tomaso, par rapport à la carrosserie qu’il venait récemment de racheter. Il fait retoucher le châssis, y colle un V8 Gurney-Weslake, qui est en fait le même V8 Ford 289 mais réalésé à 5.0l et équipé de culasses préparées chez Weslake. Une fois la greffe terminée, elle est habillée chez Ghia. Même s’il n’a pas les compétences de Shelby, il a compris que la P70 pouvait lui offrir un bon coup de pub. La voiture est officiellement présentée au salon de Turin en 1965 sous le nom de Ghia De Tomaso Sport 5000…
En juillet 66, elle s’aligne au grand prix du Mugello. Elle ne terminera pas le 1er tour ! Alejandro stoppe de suite l’hémorragie, sans Shelby, il sait très bien qu’il ne réussira pas à faire mieux. Il préfère se consacrer à sa future sportive, la Pantera, qui devrait en plus bénéficier du nouveau partenariat avec Ford en recevant un V8 made in Detroit.
Pourtant, même si elle n’était pas efficace, De Tomaso a su lui offrir une robe séduisante et futuriste. Elle avait de la gueule… mais pas les perfs, ni l’efficacité qui auraient du aller avec ! Elle va alors disparaitre des écrans radars et rejoindre la collection privée de De Tomaso pendant plusieurs dizaines d’années avant qu’il accepte de la vendre à un collectionneur californien.
L’année dernière, un éventuel retour de De Tomaso a fait du bruit en dévoilant surement l’une des plus belles voitures de ces dernières années qui fut dévoiler, la P72, directement inspirée de la P70. Un signe ?!
© Bonhams & De Tomaso via signatures éventuelles