Talbot Sunbeam Lotus : une caisse au patronyme composé de 3 marques automobiles différentes, ça sent un peu le bricolage foireux élaboré dans un obscur garage du fin fond de la Creuse. Et bah nan, c’est une vraie bagnole, et même plus, une Légende !
Donc, pourquoi cette petite boule de nerfs a-t’elle été affublée d’un patronyme si curieux ? Et bien simplement parce qu’elle a eu le malheur de voir le jour au cœur des années 70, soit en plein milieu de l’effondrement de l’industrie automobile Britannique et des chocs pétroliers successifs. Elle a donc un arbre généalogique d’enfant de la DDASS balloté de foyers en familles d’accueil !
Au commencement elle s’appelait Chrysler Sunbeam. Sunbeam, propriété de Chrysler UK, la développe sur une plateforme d’Avenger raccourcie. Objectif : investir le créneau des berlines compactes, en plein essor à l’époque. Le modèle est plutôt bien né, décision est prise de lancer une variante sportive pour en faire la promo en rallye. les Livres Sterling se faisant plutôt rares, on va donc toquer chez Lotus voir s’ils n’ont pas un truc qui traine dans un coin plutôt que de développer un moteur maison… Bingo ! Le coursier en reviendra avec un 2.2 litres bien énervé.
Cette excellente initiative arrive un peu tard, Chrysler, en plein naufrage économique, fourguant sa branche européenne à Peugeot, qui vient également de racheter Talbot… Un vrai bouquin de Zola la genèse de cette bagnole j’vous dis ! Heureusement pour elle, à Sochaux on flaire tout de suite le potentiel de cette improbable créature et on l’investit d’une mission: donner une image sportive à la nouvelle marque du groupe. On décide donc de claquer un nouveau sigle sur les fesses de la belle afin que Talbot figure sur la fiche d’homologation FIA et direction le tout récent Championnat du Monde des Rallyes. Avec succès d’ailleurs puisqu’elle raflera le titre constructeurs en 1981.
Maintenant que le portrait de la famille dysfonctionnelle a été dressé, intéressons nous d’un peu plus près à l’enfant terrible. Bah elle en impose ! Trapue avec ses larges extensions d’ailes qui couvrent des roues repoussées aux quatre coins de la caisse et ses porte-à-faux courts, elle semble prête à bondir ! Elle respire le punch et l’agilité, qualités essentielles à toute bonne chasseuse de scratchs. Cosette n’en oublie pas pour autant de surveiller sa ligne, puisqu’elle accuse à peine plus de 900kg sur la balance : une vraie Cross-Fitteuse!
Le ramage est-il à la hauteur du plumage? Soulevons le capot pour en avoir le cœur net. Force est de constater que oui, on ne sait pas trop ce qui impressionne le plus : le lettrage Lotus sur le cache culbus du gros 4 pattes 2,2 litres qui rappelle qu’on est pas chez les fragiles, ou les deux biberons à double-corps Dell’Orto qui le gavent comme un canard Lotois ? En tout cas le cocktail est efficace, puisque le bouilleur élaboré par Sir Chapman délivre pas moins de 230 bourrins qui ne demandent qu’à galoper vers les roues arrière pour faire passer le hayon devant la calandre .
A l’intérieur, pas de fanfreluches, ça respire la compet’ ! Dans cet univers monochrome noir où brillent quelques touches d’alu, on retrouve l’essentiel et rien d’autre. Une paire de baquets encadrés par un arceau bien famélique quand on le compare à ceux des WRC d’aujourd’hui. Et ouais, à l’époque on mourrait comme des hommes : this is Sparta ! Seule petite touche de couleur dans cet univers austère, le monogramme Lotus au centre du volant qui rappelle le cœur noble de la teigne.
Voilà, vous l’aurez compris, cette championne aura marqué son époque. Rare en compétition aujourd’hui malgré toutes ses qualités, c’est une chance de pouvoir détailler un exemplaire si bien préparé. Let’s race !
Prémice de mondialisation qui à du bon???