C’est en 1950 que Jaguar va débuter officiellement dans le sport auto. Auparavant, les quelques voitures engagées ne l’étaient que sur l’initiative d’écuries privées. Mais l’arrivée de la XK120 va changer les choses et lancer la première vraie voiture de course de la marque, la Type C.
L’histoire de Jaguar commence en 1922 dans la ville de Blackpool. A l’époque, William Lyons et William Walmsey s’associent pour lancer la Swallow Sidecars, une fabrique de sidecars et de carrosseries automobiles. Les affaires sont lucratives, Swallow fabrique de plus en plus de carrosseries et en 1928 elle est obligée de déménager dans des locaux plus grands situés à Coventry.
Un an plus tard, Swallow qui ne réalise quasiment plus que des carrosseries de voitures de route et de course, lance une luxueuse voiture de sport assemblée sur un ensemble châssis / moteur signé Standard, un constructeur installé lui aussi à Coventry. Elle est baptisée SS (pour Swallow Standard… ou Swallow Sidecar, Lyons s’amusera à entretenir le mystère) et connait un réel succès malgré la crise du début des années 30. A tel point qu’en 1934, William Lyons transforme la Swallow en SS Cars Ltd avant de racheter en 1935, les parts de William Walmsey. Il lance alors la SS90, dont le moteur, toujours un Standard est retouché par les ingénieurs de SS Cars.
En 1936 avec un moteur modifié à 80% en interne, SS Cars présente sa gamme de berlines, coupés et cabriolets nommés SS Jaguar. La gamme va ainsi évoluer jusqu’en 1940 où la société va cesser sa production de voitures pour participer à l’effort de guerre.
En 1945, la marque reprend ses activités et la fabrication de sa gamme de berlines appelées désormais Mk IV et Mk V. Afin d’éviter toute connotation malsaine, SS Cars devient Jaguar Cars Ltd et William Lyons, tout en continuant dans un premier temps le partenariat avec Standard, décide maintenant de produire ses propres moteurs.
L’étude et le développement de ce moteur ont même débuté avant la fin du conflit avec pour nom de code X. Les ingénieurs de Lyons vont reprendre les blocs de la SS, 4 et 6 cylindres en ligne, pour développer des nouvelles culasses à double arbre à cames en tête. Au fil des essais et des évolutions, une lettre leur sera rajoutée, XA, XB, puis XC… et ainsi de suite jusqu’à la version définitive qui sera retenue par Lyons, un 6 cylindres en ligne de 3,4 l développant 160 ch, le XK.
Prêt en aout 1948, il faut maintenant lui dessiner un châssis et une carrosserie. D’autant plus que Lyons veut que la voiture soit prête pour être présentée au London Motor Show qui se déroule… 2 mois plus tard ! Le temps presse. L’équipe va alors récupérer un châssis de Mk V afin de le raccourcir et d’y greffer le nouveau moteur. Pendant ce temps là, William Heynes va tracer une ligne aussi simple que séduisante ! La XK120 est née, affichant dans son nom, la vitesse de 120 mph qu’elle est censée atteindre. Lors de sa présentation à Londres, c’est un coup de maitre. Les spectateurs n’en croient pas leurs yeux. Les clients affluent, séduits par ce dessin, cet habitacle tendu de cuir Connoly et surtout, un prix imbattable. Pour avoir la même chose Alfa Romeo, il faut débourser le double. Le succès est au rendez vous et William Lyons, qui prévoyait une production de 200 voitures, va revoir ses objectifs à la hausse.
En 1950, afin d’amplifier l’image de son sex symbol, Lyons va alors avoir l’idée d’engager trois XK120 S (sport), quasi d’origine, aux 24h du Mans. Une abandonnera, les deux autres voitures finiront en 12ème et 15ème positions. Des résultats plutôt satisfaisants, qui allaient servir d’apprentissage aux ingénieurs de Jaguar et surtout, leur donner envie de revenir dans la Sarthe avec une vraie voiture prévue pour cela. Mais avant cela, en septembre de cette même année, c’est au volant d’une Jaguar XK120 S privée que Stirling Moss va s’imposer au RAC Tourist Trophy devant toutes les XK120 d’usine. L’occasion de se faire repérer, mais aussi de rejoindre l’équipe Jaguar officielle pour la saison 51.
William Heynes va se remettre au boulot et donner naissance à une voiture de course, la XK120 C plus connue en tant que Type C. Cette voiture, n’a rien en commun avec la XK120 si ce n’est son nom, un simple coup de comm’. Le châssis est une structure tubulaire permettant d’assurer légèreté et robustesse. Le moteur à l’avant est le 6 en ligne qui a été revu en profondeur avec de nouveaux pistons, des culasses retravaillées et équipées d’arbres à cames au profil plus pointu. Désormais gavé par un duo de carburateurs SU H8 pour permettre au moteur de passer de 160 à plus de 200 ch. A l’arrière, on retrouve la boite 4 vitesses avec volant moteur allégé, embrayage renforcé, et le pont maintenu par des bras avec barre de torsion et amortisseurs télescopiques. Devant, les liaisons au sol sont celles de la XK120 à roues indépendantes avec barre de torsion et barre antiroulis. La direction à crémaillère est plus légère, plus précise et plus directe. Enfin aux quatre coins, le pilote peut compter sur un freinage à tambour revu à la hausse. Il se cache derrière des jantes à bâtons en alliage léger qui accusent 16′ de diamètre.
C’est l’aérodynamicien Malcolm Sayer qui va signer le dessin de la carrosserie. Conçue en aluminium, elle est le fruit d’une étude aérodynamique poussée. Simple et séduisante, elle se distingue par une ligne de caisse basse et fluide. Les ailes avant courent jusqu’à celles de l’arrière nettement plus prononcées. Les phares et la petite calandre sont aussi discrets que parfaitement intégrés. Une fois sur la balance, l’ensemble n’accuse pas plus de 950 kg. Aucun doute, nous sommes bien face à une voiture de course des années 50.
En 1951, trois Jaguar Type C sont sur la ligne de départ des 24h du Mans. Celle confiée à l’équipage Moss – Fairman abandonne après seulement quelques heures de course. La deuxième pénaliser par quelques soucis techniques va mener Lawrie et Waller à la 12ème place. Enfin la troisième voiture, pilotée par Walker et Whitehead, va s’adjuger la victoire avec pas moins de 9 tours d’avance sur la deuxième voiture, la Talbot Lago T26 de Meyrat et Mairesse. Moss prendra sa revanche en remportant une nouvelle fois le Tourist Trophy quelques mois plus tard.
Dès le début de la saison 52, Moss s’adjuge la Race of Champions à Silverstone sur sa XK120 S et réédite un peu plus tard sur ce même circuit au volant de la Type C. Toujours avec la Type C, il remporte ensuite le grand-prix de la Marne sur le circuit de Reims puis Boreham International. Mais cette année, le Mans ne sourira pas aux anglaises puisque les trois voitures engagées vont abandonner.
En 53, la Type C évolue. Elle perd 50 kg et gagne 15 ch, les deux SU étant remplacés par trois Weber 40 DCOE. L’embrayage est renforcé mais surtout, on retrouve de nouveaux freins à disque développés en collaboration avec Dunlop et Girling, une première dans le sport auto.
Aux 24h du Mans, quatre Type C sont au départ. Trois voitures officielles et une engagée par l’écurie Francorchamps. Toutes sont à l’arrivée. 9ème place pour la belge pendant que les officielles vont s’offrir le doublé et la 4ème place. Moss fait une nouvelle fois partie de l’aventure dans la voiture qui terminera en 2ème position. Aux 12h de Reims, Moss remporte une dernière victoire au volant de la Type C alors que chez Jaguar, il était temps de passer à la Type D. Mais ceci est une autre histoire…
Belle histoire d’une légende. Comme même né dans la précipitation, on peut aboutir à un chef d’œuvre, chose que je pensai impossible.
Histoire à ne pas compter trop fort à tout les « décideurs » de la société actuelle qui croit qu’en l’hyper rapidité des décisions, réactivité, souplesse organisationnelle, inversions des normes, et tutti chianti …