Les 2 cousines sont souvent confondues. On pense qu’il s’agit de la Charger pour se rendre compte que c’est en réalité la Road Runner… A moins que ce soit l’inverse ! C’est pourtant bien la Dodge qui a ouvert les hostilités, suivie l’année suivante pas sa cousine. Explications…
Dans les années 60, il n’y a pas qu’au Viet Nam que les américains se livrent à une guerre sans merci ! Ce conflit parallèle à lieu sur son propre territoire, mais fera nettement moins de victimes puisqu’il se déroule sur des ovales. En effet les géants de Détroit s’alignent chaque dimanche lors des manches de la NASCAR, le sport mécanique le plus populaire des USA de par sa mentalité virile et conservatrice.
Remporter le championnat est la meilleure publicité qui puisse être donnée à un modèle, et chaque constructeur national y engage ses armes les plus affutées. Chevrolet, Dodge, Plymouth, Ford, Oldsmobile, Hudson, Chrysler, Pontiac, Mercury, Buick, chacun y est passé et a connu son heure de gloire !
De 63 à 65, Ford rafle la mise, suivi de Dodge et ensuite Plymouth les 2 années suivantes, avant que Ford reprenne à nouveau son sceptre en 68. Mais en pleine mode des Muscle Cars, le groupe Chrysler, propriétaire de la marque Dodge, veut récupérer son titre coute que coute. L’état major met alors ses meilleurs ingénieurs sur le coup, et leur confie une Charger. Le but est d’en faire une tueuse de Mustang…
Les têtes pensantes se mettent au travail. Un problème se pose, le V8 Hemi 426 se retrouve bridé par le règlement… Il faut donc chercher ailleurs. L’équipe s’en prendra donc à la carrosserie, notamment sa pénétration dans l’air. Elle habille le gros coupé sportif d’un kit remarquable et remarqué ! L’avant se retrouve taillé en biseau pour en améliorer le cx, les phares deviennent escamotables tandis que l’arrière, histoire de tenir au sol, gagne une aileron… Mais pas un truc de fillette ! Un élément dressé tout là haut à l’image des grattes ciel qui fleurissent partout dans le pays.
Pour homologuer sa Charger Daytona, Dodge se doit de produire 500 modèles routiers. 503 sortiront des usines, dont seulement 70 seront équipés du Hemi 426 (20 recevront une boite manuelle). Dodge annonçait 330 km/h, le suppo en atteindra 383 sur le lac salé de Bonneville (Avec le Hemi en version course, poussé à 550 ch). Cela n’empêchera pas Ford de remporter à nouveau le titre en NASCAR ! Objectif raté…
Mais qu’à cela ne tienne, c’est la cousine qui prendra le relai l’année suivante, la Plymouth Road Runner. On prend presque les mêmes et on recommence, l’avant, l’aileron, la recette est identique. Les 2 soeurs semblent jumelles, mais à mieux y regarder, les différences sont là, quelques détails sur la face avant, les flancs, le pare choc arrière, les portes à faux,… Mais c’est vrai que cet avant de missile et l’aileron proéminent attirent toute l’attention. On reste obnubilé par l’avant et l’arrière, et l’illusion est facile.
Le Road Runner devient ainsi Superbird, reçoit sous son capot le même V8 Hemi et ses 425 ch. La production sera plus généreuse que pour sa cousine avec 1935 modèles dont 135 avec le Hemi (77 en automatique et 58 en manuelle 4 vitesses). Sur la piste, la Superbird vengera sa cousine en remportant le si souhaité titre NASCAR 69 avant de prendre sa retraite.
Alors l’histoire a retenu la seconde, plus largement diffusée et auréolée aux mains notamment du King Richard Petty. Par contre, les collectionneurs se damnent pour la 1ère, tout aussi envoutante, mais plus rare.
Pour les anecdotes, une Charger Daytona Hemi s’échange aujourd’hui pour environ 800.000 $ alors que sa cousine Superbird, avec le même moteur, sera vôtre pour moitié moins. La Superbird a reçu les honneurs des studios Pixar dans Cars alors qu’une Daytona (Une réplique…) s’est retrouvée à jouer les 1ers rôles dans Fast & Furious 6.
Enfin l’histoire de cet immense aileron est simple… Pour être efficace, les ingénieurs étudièrent une hauteur minimum, mais le problème est qu’il était alors impossible d’ouvrir le coffre entièrement. Impensable pour la version « civile ». Il fallu donc l’élever pour qu’il puisse rester efficace sans nuire à une utilisation normale en empêchant le coffre de s’ouvrir. La hauteur finale donne le vertige et deviendra par la même occasion l’un des signes distinctifs de la voiture. En 50 ans, on n’a jamais vu plus haut !
© Signatures éventuelles
Maxime Lasserre