Au sein de la grande famille des carrossiers italiens, Ghia est probablement le plus discret, mais aussi le plus ancien puisque la « carrozzeria » a vu le jour en 1916 à Turin. Parmi les créations du maestro, il a existé une lignée un peu spéciale, nommée Ghia Supersonic. Et son histoire, Père Castor va vous la raconter !
A ses débuts, Ghia dessine et fabrique des carrosseries de voitures de sport. L’atelier s’est spécialisé dans la maitrise de l’aluminium, formant les tôles pour leur donner vie. C’est lui qui tracera les lignes de la magnifique Alfa Romeo 6C 1500 qui s’imposera notamment aux Mille Miglia en 1929. Avant la guerre, les 3 constructeurs italiens, Fiat, Lancia et Alfa font régulièrement appel à ses services.
En 43, en plein conflit mondial, Giacinto Ghia ne supporte pas de voir son atelier bombardé par les alliés. Totalement détruit, il y laisse la santé et décède au début de l’année 1944. La Carrozzeria Ghia est alors reprise par ses collaborateurs qui en profitent pour ouvrir une succursale en Suisse, à Aigle, d’où son nom de Ghia-Aigle (Ouais, le mec du marketing il dormait quand ils ont cherché le nom !).
En 53, la Carrozzeria change de direction, Mario Boano qui avait succédé à Giacinto Ghia revend ses parts à Luigi Segre, ingénieur et designer. Ghia va alors vivre ses heures les plus prolifiques et créatives. Alors que Boano a embarqué la collaboration de Fiat avec lui, Ghia se rapproche de Ford, VW, Volvo et Chrysler. Les modèles vont s’enchainer les uns après les autres, en fonction des directeurs de production… Le 1er coupé VW Karmann, la Lincoln Futura, la Volvo P1800… les réalisations ne manquent pas.
En parallèle, Ghia va imaginer une lignée de voitures baptisées Supersonic et proposant un style qui descend directement de la tendance Jet, qui, comme son nom l’indique, va chercher son inspiration dans l’aviation et l’étude de son aérodynamisne.
C’est là que l’histoire devient intéressante. Ghia va s’emparer de 20 châssis, tous de provenances différentes pour ensuite les habiller d’une carrosserie aux lignes dictées par le vent et dessinées par Giovanni Savonuzzi, alors directeur de production chez Ghia.
Parmi ces 20 châssis, on retrouve un seul sur base d’Alfa Romeo 1900. La Ghia Supersonic va participer à l’épreuve des Mille Miglia de 1953, malheureusement elle n’en verra pas la ligne d’arrivée. La caisse est quasiment détruite… et son propriétaire-pilote va récupérer le châssis et faire reconstruire la caisse sous forme de barquette.
S’ajoute à cela 14 châssis de Fiat 8V recarrossés, dont 12 sont encore répertoriés de nos jours. D’ailleurs l’un d’entre eux a été remplacé en 1965 par un châssis d’AC Cobra de course ! Création de l’anglais John Willment, ce modèle unique est connu sous le nom de Willment Ghia 427 Coupe ou encore AC Cobra 427 Ghia Supersonic. La carrosserie, légèrement modifiée, adopte un style qui pourrait faire penser à un custom tout droit sorti de l’imagination de George Barris !
Les 3 autres châssis étaient anglais, des Jaguar XK120. Sur les 3 voitures produites en 1954, une seule aurait survécu aux affres du temps. Entièrement restaurée en 1990, chacune de ses sorties est un véritable évènement comme à Rétromobile en 2006 ou à la Villa d’Este en 2009.
1 seul et unique châssis a été confié par Aston Martin. Chose assez rare pour être signalé… oui, à l’époque, on ne touche pas une Aston ! Cela n’empêchera pas une DB2/4 de recevoir l’appellation Supersonic.
Bon, si vous n’avez pas trop pioncé en cours de maths, et suivi un chouilla c’que je m’efforce de vous raconter (J’vous laisse imaginer les recherches… pour remonter les sources !), vous aurez donc compté : 1 + 14 + 3 + 1 = 19… Ah, il en manque 1 ! Qu’il a fallu aller vous chercher… La De Soto Adventurer II Ghia Supersonic de 1954.
Voilà, vous savez presque tout sur la famille Supersonic… Sachant qu’aujourd’hui chaque modèle côte un minimum de 7 chiffres ! Et même si je sais que lorsque je vous parle de ce genre de caisse, ce n’est pas trop votre truc (Vous déconnez quand même !).
Pour finir avec l’histoire de Ghia, après quelques années compliquées et la mort de Luigi Segre, elle est rachetée par Ramfis Trujillo en 66 qui la revend dès l’année suivante à Alejandro De Tomaso avant de devenir la propriété de Ford en 1973 . Ghia devient le label haut de gamme de la marque jusqu’en 2010, remplacée par la gamme Titanium. Depuis, Ghia se contente d’être de studio de design du constructeur en se chargeant de l’étude de ses concept-car. Il n’empêche qu’avec ses Supersonic, Ghia a probablement signé des engins parmi les plus beaux des 60’s.
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