Guy Ligier, c’était un vrai touche à tout. Sportif, entrepreneur, pilote, un passionné passionnant qui a laissé son nom dans le sport auto et même sur la route. On en avait jamais parlé sur DLEDMV… L’heure est donc venue de vous présenter le Monsieur et sa Ligier JS1.
Le seul qui avait timidement parlé de Ligier, c’était Julien qui était resté sur la JS P2 Onroak. On va donc aller un peu plus loin et présenter Guy Ligier aux jeunes pubères qui doivent déjà se demander c’que viennent foutre des caisses sans permis sur leur site préféré !
Guy Ligier a vu le jour en 1930 à Vichy. Orphelin à 7 ans, il devient apprenti boucher alors qu’en parallèle, il se défoule dans le sport. A 17 ans, il est champion de France d’aviron et enchaine rapidement avec une carrière professionnelle dans le rugby à XV, devenant international en équipe de France B ainsi qu’en équipe de France militaire. Au milieu des années 50, il s’essaye aux sports mécaniques avec la moto. En 1959, il est champion de France 500 cm3.
Professionnellement, il abandonne le tablier de boucher pour investir dans du matériel BTP et trouve des associés pour ouvrir sa société Ligier Travaux Publics située à Vichy. Avec un réseau autoroutier français en plein développement, il va rapidement décrocher énormément de contrats. Les affaires sont florissantes et la fortune sourit à Guy Ligier, ce qui va lui permettre de financer ses saisons en sport méca.
En 64, il débute aussi bien en F2 qu’en endurance, notamment aux 24h Mans où il finira 7ème sur une Porsche 904. L’année suivante, il remporte sa 1ère course, mais abandonne au Mans en compagnie de Trintignant sur une GT40. En 66, au volant d’une Ford Mustang Shelby, il devient champion de France des rallyes en catégorie « Grand Tourisme – Sport – Sport proto ». Cette même année, ses bons résultats vont aussi lui ouvrir les portes de la F1. Il participe à 6 GP, sans parvenir à marquer le moindre point au volant d’une Cooper T81 à moteur V12 Maserati. Pourtant, il récidive la saison suivante et refait 4 GP avec la même voiture puis 3 sur une Brabham BT20 motorisée par un V8 Repco. Il termine la saison avec 1 seul point à son actif. En parallèle, en compagnie de son ami Jo Schlesser, il remporte les 12 heures de Reims sur une Ford GT40 MkII. En 68, il revient en F2, manifestement plus accessible aux petites structures contrairement à la F1 qui nécessite des budgets pharamineux pour espérer viser des résultats intéressants. Mais, le 7 juillet, au grand prix de France de F1, Jo Schlesser se tue au volant de sa Honda RA302 expérimentale. C’était son premier gand prix dans la discipline reine ! Guy est touché et décide illico de mettre un terme à sa carrière de pilote.
Jo Schlesser et Guy Ligier étaient plus que potes… Ensemble, ils envisageaient de développer et de commercialiser une voiture de course. C’est un peu l’ambition de beaucoup de pilotes. A force d’être au volant, et de ressentir les défauts, ils imaginent les points à modifier et améliorer afin d’être encore plus rapides, plus performants. C’était le cas de Guy et Jo qui passaient leur temps à réfléchir à une GT avec laquelle ils pourraient aller mettre la fessée aux Alpine, Porsche et autres Shelby. Pour eux, la voiture doit d’abord être pensée pour la course puis ensuite, adaptée à la route. Pour cela, il faut un châssis rigide, une architecture efficace, un moteur puissant et fiable et enfin un poids limité. C’est simple !
Pour l’architecture, ce sera moteur central arrière. Les Porsche 904 et Ford GT40 en ont largement démontré l’avantage. Pour le châssis, ils partent sur une poutre centrale, rigide et légère. Enfin au niveau du bloc, un 4 pattes Ford Cosworth devrait faire l’affaire. Doucement, les deux hommes forment le cahier des charges de leur Ligier-Schlesser, sachant que l’objectif est d’en faire une voiture capable de gagner aussi bien sur circuit qu’en rallye ! Puis nous en arrivons au malheureux accident mortel de Schlesser, laissant alors Ligier bien seul face à ce projet imaginé à deux.
Mais il en faut plus pour décourager et abattre Guy et en 69, sur les conseils du journaliste Jean Bernardet, il met en place une petite équipe qui va être chargée de faire passer le projet du papier à la route. Michel Têtu en prend la direction. Cet ancien ingénieur de chez CD s’entoure de deux fidèles de Guy Ligier (Pierre Bouillard et Roger Nebout), d’un motoriste allemand et de 3 mécaniciens anglais dont un ex-plasturgiste de chez McLaren.
Guy Ligier supervise l’équipe et valide les différentes directions qui s’appuient sur pas mal d’innovations. Pour limiter le poids sans pénaliser la rigidité, le châssis poutre va être accompagné de panneaux en alu prenant en sandwich de la mousse polyuréthane. Double triangulation aux 4 roues, amortisseurs arrière horizontaux, freins à disque… La carrosserie, est signée par Pietro Frua, c’est sa première voiture à moteur central. Le gabarit est compact avec 3,9m sur 1,7m de large et 1,02m de haut. Malgré tout, son châssis permet un habitacle accueillant et spacieux et surtout, un poids de 687 kg.
Au final, la Ligier JS1 (en hommage à Jo Schlesser) est présentée au salon de Paris 1969, équipée d’un 1.6l Ford Cosworth FVA de F2. Quelques semaines plus tard, Guy Ligier est derrière le volant pour prendre le départ du Critérium des Cévennes. Malgré des débuts prometteurs, un support moteur va lâcher et contraindre l’équipe à l’abandon.
Dès mars 70, on retrouve Guy et sa JS1 équipée d’un Ford FVC – un 1.8l de 220 ch – au départ d’une course à Albi. Il gagne sa classe. Une 2ème voiture est assemblée pour les 24h du Mans où Guy Ligier est accompagné de Jean-Claude Andruet. Les essais sont prometteurs avec un 7ème temps.
Puis la JS1 enchaine les courses… Un abandon au Trophée du Paul Ricard, une victoire à Montlhéry, une 3ème place à Magny-Cours pour finalement abandonner au 24h du Mans suite à une casse de la distribution.
En septembre on retrouve les deux Ligier JS1 au Tour de France auto. Guy a profité de l’été pour les faire modifier. Leur empattement a pris 25 cm mais c’est pour la bonne cause. Derrière le pilote et son copilote, leurs 4 cylindres ont été abandonnés pour retrouver à la place deux V6. Le premier est un Ford 2.4l avec une culasse Weslake alors que second est celui d’une Ford Capri 2600 préparé par Neerpasch. Les voitures sont désormais plus puissantes, plus coupleuses mais aussi plus lourdes puisqu’elles accusent désormais 740 kg. Pourtant, elles ne verront pas l’arrivée de la course, contraintes à l’abandon.
L’histoire de la JS1 va s’arrêter là. A part ces deux exemplaires destinés à la compétition, aucune version routière ne verra le jour. Non pas que Guy allait jeter l’éponge, juste qu’il avait décidé de les faire évoluer… La JS1 allait laisser sa place à la JS2. Mais ceci est une autre histoire…
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Beau pan de l’histoire automobile française, qui à malheureusement été oublié avec une suite et surtout tragi-comique, à la française diront les plus railleurs dont je fait partie!!!
Merci pour ces renseignements qui m’aident, avec surprise, à remonter l’histoire des JS1et JS2 au Criterium des Cévennes, ou assez étonnamment JCR ANDRUET y fut copilote de Liguer!