’87 VW Golf Bimoteur Pikes Peak – La chasse aux nuages !
par Thierry Houzé | 26 octobre 2024 | Racing |
Au début des années 80, Pikes Peak devient le terrain de jeu de certains constructeurs européens qui vont chercher à s’y imposer ou du moins, y faire un résultat afin de se payer un bon coup de comm’ sur le marché américain. Si Audi et Peugeot y sont rentrés dans la légende, VW y a envoyé une violente Golf Bimoteur qui aujourd’hui, pose ses roues sur DLEDMV…
Unlimited…
Au delà de la course devenue aujourd’hui mythique, Pikes Peak c’est aussi et surtout un défi technique. Certaines voitures perdent jusqu’à 30% de puissance entre un départ déjà perché à 2865 m et une arrivée qui culmine à 4302 m. Plus tu montes en altitude, plus le taux d’oxygène diminue… d’où l’emploi de turbos qui permettent de passer les blocs sous respiration artificielle et ainsi tenter de limiter ce phénomène naturel, notamment dans la catégorie Unlimited qui, comme son nom l’indique, n’impose aucune limitation de puissance. C’est cette classe qui a donné naissance aux monstres que sont les Audi Sport Quattro et 405 T16 mais aussi la Suzuki Escudo, Saab 9-3 Viggen, Ford RS200, Toyota Celica et Tacoma ou encore la 208 T16 et la VW ID R recordman de la montée avec Romain Dumas.
La Golf entre dans le game
Dès le début des années 80, l’état major de VW donne son feu vert et valide le budget pour développer et engager une voiture dans le célèbre Hillclimb du Colorado. Par contre, la base doit être une Golf 2 et rien d’autre. Le département motorsport de VW se lance et développe un premier proto, une traction équipée du 1.3 l de la Polo dopé par un turbo. Dès les premiers essais, la motricité n’est pas là et la voiture s’avère être un véritable bide… alors plutôt que de s’obstiner, on préfère confier le projet à Kaimann Racing Team, une structure autrichienne née en 66, et qui a notamment fait courir et gagner Helmut Marko, Niki Lauda, Keke Rosberg ou encore Jochen Mass dans plusieurs formules de promotion.
Deux moteurs, c’est mieux qu’un !
A l’époque, le tracé de Pikes Peak n’est pas goudronné. Depuis 1982, Audi fait des ravages avec sa transmission intégrale qui va rapidement devenir incontournable pour viser la victoire. Pourtant, Kaimann Racing ne va presque pas utiliser la même solution. 4 roues motrices oui, mais plutôt que de miser sur une transmission Syncro encore en développement (le Quattro de VW), l’équipe autrichienne va préférer imaginer une originale Golf 2 Bimoteur. Un bloc à l’avant pour les roues avant et un second derrière pour les roues arrière ! Chaque moteur avec sa boite mais un seul levier de vitesses associé à une crémaillère étudiée pour commander simultanément les deux boites. Bah oui, pourquoi faire simple ?!
3ème au général
Les ingénieurs assemblent une structure tubulaire qui sera ensuite habillée par des panneaux en fibre reprenant le look de la voiture du peuple. Sous ses airs, la Golf 2 Bimoteur Pikes Peak affiche 20 cm de plus que la version d’origine. En fait les seuls points communs sont les phares et les poignées de portes. Tout le reste a été fait spécifiquement pour elle afin de la poser sur des trains roulants élargis au maximum. Devant et derrière, on retrouve du coup deux 4 cylindres 1.3 l turbo empruntés à deux Polo. Après des essais concluants en Europe, la Golf va faire sa première tentative en 85. A son volant, le pilote allemand Jochi Kleint va réussir à accrocher une magnifique 3ème place au général. La base est bonne, ne reste plus qu’à la faire évoluer pour aller chercher la victoire.
Du 1.3 l au 1.8 l
De retour chez Kaimann Racing, l’équipe va alors assembler une deuxième voiture qui abandonne les 1.3 l pour voir débarquer à leurs places, des 1.8 l provenants de la Golf GTi. Ils sont dopés aux turbos et le monstre passe à 650 ch sachant que pour des questions de stabilité et de motricité, le moteur arrière est un chouill’ plus puissant que son jumeau situé à l’avant. Le challenge des ingénieurs va être de compenser les différences de régimes entre les deux gaziers lorsque l’un des trains commence à patiner rendant alors la voiture trop sous vireuse ou trop survireuse. Un développement plus long que prévu qui obligera VW de participer à l’édition 86 avec la Bimoteur 1.3 l avant de revenir en 87 avec la version Bimoteur 1.8 l.
L’histoire ne retient que les vainqueurs…
Lors de l’ascension, la Golf Bimoteur va mener la danse. En avance sur ses rivales, Jochi Kleint est malheureusement contraint d’abandonner à 500 m de l’arrivée, une rotule de suspension vient de lâcher ! En sport auto, l’histoire ne retient que ceux qui gagnent, en l’occurence le 3ème sacre consécutif de l’Audi Quattro de Walter Röhrl. Malgré sa perf, VW jette l’éponge, arrête le projet et la Golf Bimoteur va tomber dans l’oubli jusqu’en 2018 où elle a été entièrement restaurée comme pour donner une légitimité à l’ID R fonctionnant à piles, avant d’être exposée au VW Auto Museum de Wolfsburg.