La Porsche 914… Hooo une VW, la Porsche du pauv’, une Audi… gnagnagni gnagnagna ! C’est entrée gratuite au bal des incultes. Parce que si on prend un peu le temps de se pencher sur le cas de la Porsche 914, on s’rend vite compte que derrière son pedigree roturier, elle affiche un caractère et un comportement de sportive et un palmarès digne d’une vraie Porsche.
Avec l’arrivée de la Porsche 914 en 69, le constructeur allemand cherchait surtout à reconquérir ceux qui roulaient en 356 et qui étaient un peu décourager par la 911, beaucoup plus chère. Une sorte de Porsche à pas cher pour aller séduire les jeunes clients aisés. Chez VW, c’est le coupé Karmann type 34, un best seller pour la marque, qui arrive en fin de carrière… Ceci expliquant cela, les deux constructeurs vont avancer ensemble dans ce projet commun où, en fonction des marchés, elle sera vendue soit sous le logo Porsche, soit sous celui de VW.
Comme il fallait séduire les clients des deux marques, les lignes vont être tracées avec beaucoup de douceur… tout comme les moteurs, des Flat 4 qui manquaient de puissance et de caractère. La faute en partie à un châssis made in Porsche, qui donne le sentiment d’être au volant d’une voiture sous motorisée. Pourtant, avec moins d’une tonne sur la balance, si la 914 ne pulvérise pas les chronos en ligne droite, dès que ça commence à tourner, elle sait passer fort et exploiter chaque cheval qui sommeille en dessous de son capot. Les canassons sont loin de mettre à mal la motricité faisant de la bébête une ballerine, plus qu’une sprinteuse. Son truc finalement, c’est de jouer avec l’équilibre offert par son architecture en central arrière, et de maitriser les subtilités du transfert de masse, même si on est vite frustré en se rendant compte qu’il en aurait encaissé bien plus ! Les amateurs de fiches techniques la condamneront sans même l’essayer… Ceux qui oseront poser leur cul derrière son volant seront séduits bien que la plupart lui reprocheront son manque de punch. Les européens la bouderont… les américains l’adoreront et l’adopteront !
Ce qui est quand même marrant dans l’histoire de la 914, c’est que si beaucoup n’ont retenu que les 4 cylindres, Porsche avait pourtant greffé au centre de sa sportive, le Flat 6 2.0 l de la 911. Avec 109 ch pour 985 kg, elle affichait des chronos qui n’avaient rien de ridicules une fois remis dans le contexte de leur époque. 0 à 100 en moins de 10 secondes, le 400 m en 16,1 et la borne en 30… en 70, ça faisait le job. D’autant plus qu’en bonne Porsche, la 914/6 GT allait avoir une carrière sportive marquée dès son entrée en jeu par un tonitruante 6ème place au général des 24h du Mans (Victoire en GT), juste derrière les Porsche 917 et Ferrari 512S… ‘scusez du peu !
Et pourtant même avec son Flat 6, la Porsche ne trouvera pas sa clientèle. Comme quoi… ce n’était pas forcément une histoire de moteur. Les porschistes européens, voulaient de la 911… point barre ! Heureusement, les américains allaient y trouver leur compte… et pas qu’un peu puisque le marché outre-Atlantique allait à lui seul absorber quasiment les 2/3 des 118973 voitures produites.
Cette 914 est un hommage à la /6 GT… née 914/4 en 76, elle allait traverser l’Atlantique pour rejoindre le garage d’un certain Jeff Lewis, membre du célèbre R Gruppe. Une fois éligible en HMSA (Historic Motor Sport Association) il va la faire préparer et taquiner du circuit. Mais les choses sérieuses vont avoir lieu en 2001 alors qu’elle change de main pour être racheté par Mark Leonard le boss du garage Grand Prix Classics.
C’est là qu’elle va être désossée, habillée d’un kit en fibre de 914/6 GT et de vitres en plexy avant de recevoir un Flat 6 préparé chez Ryan Racing Restorations. Double allumage, grosses soupapes, ensemble mobile forgé, arbre à cames retaillés, grosse pompe à huile et passage en carter sec, carburateurs PMO en 46mm, ligne complète sur mesure… le tout pour envoyer 240 ch aux roues arrière en passant par un volant moteur allégé, un embrayage renforcé et une boite – pont manuelle à 5 rapports, équipée de son propre radiateur d’huile et accouplé à un différentiel à glissement limité.
Avec ce cheptel, le châssis a lui aussi reçu son lot de renforts. Moyeux à cinq boulons pour pouvoir monter des Fuchs en 15″ chaussé en Hoosier. Les jambes de force viennent d’une 911 et sont accompagnées d’amortos Koni Sport et de barres de torsion plus grosses. Les tirants ont été empruntés à une 911 turbo et les bagues sont en bronze. Quant au freinage, c’est un panach’ entre des étriers de Boxster qui mordent des disques de 911 S.
Enfin dans l’habitacle on retrouve bien entendu le minimum syndical, avec arceau, panneaux de portes et moquette RS, baquets Recaro avec harnais, volant Momo, commutateurs, shift light… et tout c’qu’il faut pour un bon racing spirit.
A l’arrivée la bestiole se la joue bad girl avec 240 bourrins énervés pour un peu moins de 900 kg. De quoi chauffer le bitume et shooter la trajo’ tout en tournant autour de quelques 911 moins affutées… une jolie revanche pour celle qui a mis du temps pour trouver sa place dans la famille Porsche !