Dès le jour de sa présentation au salon de Paris en 55, la Citroën DS n’a cessé de porter l’étendard de la french touch sur quatre roues pour la faire rayonner à travers le globe. A l’époque, la référence du comportement routier, du confort et de l’avant-gardisme, c’était elle. Et force est de reconnaitre que depuis, aucune autre berline française n’a réussi à regagner cette aura…
Rassurez vous, je ne vais pas me déguiser en père motor avec l’ambition de vous conter l’histoire de la berline française… elle mérite un bouquin plutôt qu’un article de 600 mots ! Non, je vais me contenter de celle qui nous intéresse aujourd’hui, venue clôturer les 20 années d’une carrière aussi riche que variée, faite d’évolutions incessantes. Ainsi, pour beaucoup, la Citroën DS 23 ie Pallas représente le bouquet final de la gamme, mais aussi le modèle le plus abouti.
Depuis 55, la ligne originelle signée Flaminio Bertoni, n’a été revue qu’en 67 par Robert Opron (Bertoni est décédé trois ans auparavant) qui lui a offert une face avant plus affutée avec deux blocs optiques carénés qui encadrent une calandre bien plus fine. Les phares possèdent maintenant un original système qui permet de les orienter lorsqu’on tourne le volant. Hormis ce restyling, le reste n’a pas été modifié. La poupe est toujours aussi plongeante, et la lunette arrière a conservé ces deux clignos ronds de chaque côté, à l’orée du toit. Presque 70 ans plus tard, le charme opère toujours autant, quel que soit l’angle avec lequel on la regarde. Fallait être vachement couillu pour oser sortir un tel dessin en 55, et on comprend mieux la révolution et la stupéfaction qu’elle a engendrées.
Mais la gifle ne s’arrête pas là. La DS embarque une technologie délirante pour l’époque, notamment sa célèbre suspension hydropneumatique offrant un comportement efficace associé à un confort royal. Un système complexe et innovant. En effet, le circuit d’huile alimente les suspensions, le freinage et la direction assistée. Ajoutez y un correcteur d’assiette, des freins à disques commandés par un champignon qui faisait plus office d’interrupteur ON-OFF que de pédale, un embrayage semi-automatique et une ribambelle d’accessoires modernes et vous comprendrez pourquoi la DS, à sa sortie, a effrayé aussi bien les concessionnaires de la marque que tous les mécanos du réseau secondaire. Dès qu’ils en voyaient une arriver dans leurs ateliers, ils étaient à deux doigts du taillage de veines !
Mais au fil des années, la DS a su se fiabiliser et évoluer. Le restyling de 67 a même donné le feu vert à une course à la puissance. Née avec le bloc de la Traction – un paradoxe en soit quand on voit son look et la technologie embarquée – il faudra attendre quelques années avant de voir la berline équipée d’un véritable bloc digne de son statut et de sa ligne aussi moderne. Imaginée pour recevoir un 6 cylindres, elle devra finalement s’en contenter de 4 tout le long de sa carrière.
A son lancement le 4 cylindres affiche 1.9 l pour seulement 75 ch avant de passer à 83 ch en 61. Mais c’est à partir de 65 que les choses vont devenir sérieuses avec l’arrivée du 2.0 l de 90 ch et du 2.1 l (en fait un 2.2 l) de 109 ch en carbu ou 125 ch avec l’injection électronique Bosch. En 72, il est remplacé par le 2.3 l disponible lui aussi en carbu ou en injection pour en tirer respectivement 115 ou 130 ch. Avec un peu moins de 1400 kg sur la balance, la DS 23 ie affichait des performances qui faisaient d’elle une des reines de la file de gauche… sans pour autant se la jouer sportive.
C’est l’une d’elle qui défile devant vos yeux. Un des derniers millésimes qui, pour ne rien gâcher, s’affiche dans la finition Pallas, la plus luxueuse du catalogue. A l’extérieur, on la reconnait à ses baguettes en inox en haut, en bas et au 3/4 des portières, à des enjoliveurs qui ont été modifiés et au logo spécifique sur les panneaux de custodes. Dans l’habitacle, de nombreuses commandes sont maintenant chromées et la sellerie adopte sur la plupart des modèles, un cuir pleine fleur (mais il y a également eu des version avec tissu et skaï). Les lumières de plafonnier font leur apparition tout comme des dragonnes de maintien au dessus des ceintures de sécurité, ainsi qu’une ribambelle de détails en fonction des différents millésimes.
Aujourd’hui, la Citroën DS 23 ie Pallas, c’est une philosophie, un état d’esprit incomparable. Rien d’autre ne ressemble à une DS. Que ce soit son style, son comportement, sa personnalité ou même l’ambiance dans laquelle elle vous plonge. Un subtil mélange de néo-rétro vintage qui n’a presque pas vieilli et est même devenu tendance. Car la force de la DS c’est que malgré son âge, elle affiche une identité terriblement décalée et… actuelle ! En terme de qualité de roulage et de confort, elle n’a rien à envier à une moderne, au contraire, elle peut peut être même leur en apprendre, et en bonus, elle apportera un charme délicieux. Et dans le monde automobilistique actuel devenu aussi impersonnel que formalisé, la DS reste, même 70 ans plus tard, un véritable ORNI qui vous donne envie de savourer chaque kilomètre parcouru à son volant. C’est peut être ça l’avenir de la mobilité… faire redécouvrir le plaisir de rouler pour donner l’envie de conserver une voiture plutôt que de la remplacer tous les deux ans…!
© classicfun via BaT
Bel article qui confirme la richesse de DLEDMV et son éclectisme. Toujours un plaisir de lire votre production aussi discordante qu’enrichissante. Pour l’anecdote : Bertoni aurait renié la DS. Il l’a esquissé ainsi à contre coeur et préférait ses AMI, au dessin plus abouti selon lui. Le vrai père de la DS est André Lefebvre, qui a conçu la technologie embarquée que vous évoquez avec justesse mais sans le citer 😉 . Les brevets furent exploités par Rolls-Royce. Lefebvre a fait ses classes chez Avion-Voisin, autre constructeur français totalement barré de l’Entre-Deux-Guerres. André Citroën le débaucha lors de la liquidation d’Avion-Voisin. Dans la production automobile récente, il n’y a bien que Mazda, ou Tesla dans une autre catégorie, pour avoir les c…illes et l’imagination nécessaires. Encore merci à vous
Merci pour tous ces détails Tybo
Que n’a-t-elle pas été proposée en 6 cylindres, ou en diesel… J’en ai possédé deux (une 21 boite méca et une 23 ie) et en garde un souvenir ému…