’56 Maserati A6G/54 Zagato… Deliziosamente sportivo !
par Thierry Houzé | 23 mars 2019 | Street |
En 1947 chez Maserati, quand on a voulu commercialiser une GT, on n’a pas fait les choses à moitié… Un châssis directement issu de la course auto et un 6 cylindres aux mêmes origines. Pour la carrosserie, il était possible de choisir sa robe, Vignale, Pininfarina, Ghia, Allamano, Frua… ou comme celle qui s’apprête à poser ses roues sur DLEDMV pour la première fois, la Maserati A6G/54 Zagato…
La fratrie Maserati était composée de six frangins, Carlo, Bindo, Alfieri, Mario, Ettore et Ernesto ! Cinq feront carrière dans la mécanique et l’automobile… Mario deviendra artiste et sera d’ailleurs à l’origine du logo de la marque qu’il dessinera en s’inspirant de la fontaine de Neptune à Bologne. Mais nous n’en sommes pas encore là…
Carlo, le frère ainé, se tue en 1910… à l’époque il était pilote d’essai et avait déjà travaillé pour Fiat, Isotta-Fraschini, Bianchi et Junior. Cela ne refroidira pas Alfieri, rapidement rejoint par Ettore et Ernesto, d’ouvrir en décembre 1914 la « Societa Anonima Officine Alfieri Maserati », un atelier de préparation spécialisé dans les Isotta-Fraschini, chez qui travaille le dernier frère, Bindo (Ouais prenez des notes, ce sera plus simple pour certains !). Mais voilà, l’Italie rejoint le conflit mondial et les activités cessent jusqu’en 1918. Une fois la guerre terminée, les frères Maserati s’installent à Bologne et se lancent enfin dans la course auto au volant d’Isotta modifiées à leur sauce, notamment une Tipo Speciale de 6.3l avec laquelle Alfieri remporte quelques courses de côte.
En 1926, Alfieri décide de faire passer l’entreprise du statut de préparateur à celui de constructeur et la Tipo 26 voit le jour, avec sous son capot, un 8 cylindres double arbres suralimenté, affichant 1.5l de cylindrée. Le trident apparait alors pour la première fois sur le radiateur d’une voiture… mais l’année suivante, il est victime d’un grave accident… Cela ne va pas les empêcher de continuer et les Maserati vont enchainer les victoires, aux mains d’Ernesto, de Baconin Borzacchini ou de riches clients-pilotes qui vont alors permettre à la marque de remplir ses caisses et de s’offrir une bonne publicité dans le milieu du sport auto. En 1929 Borzacchini accroche le record du monde de vitesse sur 10 km au volant d’une Maserati V4 qui, comme son nom ne l’indique pas, est motorisée par un V16… Encore un succès retentissant qui fera que la marque connait une période faste qui lui permet de traverser la crise qui va frapper la même année. En 1930, trois amateurs fortunés font réaliser deux cabriolets chez Castagna et un spider alu chez Zagato pour habiller des châssis Maserati… Il s’agit ainsi des premières routières, même si elles ne sont pas officielles puisqu’issues d’initiatives privées !
En 1932, Alfieri décède des séquelles de son accident de 1927. Bindo quitte Isotta-Fraschini et reprend la direction de Maserati en compagnie de ses deux frères Esnesto et Ettore. Mais en 34, l’arrivée des monstrueuses et surpuissantes Mercedes et d’Auto Union, accompagnée du changement de la règlementation, font que Maserati préfère se focaliser sur les petites cylindrées. 3 ans plus tard, malgré les bonnes ventes et les victoires de 6CM, la gestion de l’entreprise est beaucoup trop légère, les frais trop lourds, et les difficultés financières se font sentir, obligeant les trois frères à vendre la majorité de leurs parts à Adolfo Orsi, un riche industriel de la région de Modène. Passionné de course auto il propose alors aux Maserati de signer un accord qui va les lier à la marque pendant 10 ans.
En 1940 Maserati déménage à Modène et participe à l’effort de guerre. La production automobile est stoppée et la marque conçoit et assemble des bougies d’allumage, des batteries ainsi que des petits utilitaires électriques. Mais la grosse révolution pour Maserati va débarquer à la sortie de la guerre en 1946… Vendre des caisses de course c’est bien, mais vendre plus de voitures, ce serait mieux… du coup, la marque s’apprête enfin à lancer sa première GT, la A6 (A en hommage à leur frère Alfieri et 6 pour 6 cylindres), un coupé dessiné par Pininfarina (Quelques uns seront cependant signés Zagato) qui va reprendre le 6 cylindres 1.5l des voitures de course, ramené à 64 ch.
Maserati a vendu 61 voiture quand en 1950, la A6 évolue et devient A6G 2000. La Maserati A6G était en fait un châssis avec un moteur, en l’occurence le 6 en ligne qui passait à 2.0l gavé par trois carbus Weber 40 pour sortir 100 ch, encore un peu just’ même si elle n’accuse que 1000 kg. Pour la carrosserie, les clients avaient le choix entre plusieurs spécialistes, Ghia, Vignale, Pininfarina, Bertone, Allamano, Frua ou Zagato. Seulement seize voitures verront le jour, neuf dessinées par Pininfarina en coupé coach 2+2, quatre cabriolets et un coupé signés Frua, un autre par Allemano et un dernier chez Vignale, aux courbes tracées par Giovanni Michelotti.
Mais à partir de 1954 la A6G 2000 évolue en devenant A6G 2000 Gran Turismo, plus connue sous le nom de A6G/54. Sous son capot, elle reçoit le 6 cylindres des modèles de course A6GCM (Campionato Monoposto… monoplace) et A6GCS (Campionato Sportprototipi). Le moteur est passé entre les mains expertes de Gioacchino Colombo (Qui signera aussi les V12 Ferrari…). Il reçoit une culasse double arbres et développe désormais 150 ch (Jusqu’à 190 en course)… en 56 un double allumage lui fera gagner 10 ch supplémentaires.
Là encore, plusieurs carrosseries sont proposés… 21 clients choisiront l’élégant coupé 2+2 Allemano, 7 préfèreront le coachwork 2+2 Frua et 12 le Gran Sport spyder du même carrossier. Enfin 20 signeront pour le racé Zagato… proposé soit en Coach, soit en Berlinetta (2 et 3 volumes), qui défilent sous vos yeux.
Pour être honnête avec vous, je pensais avec cet article, vous causer, peinard, de la première GT Maserati, une sportive aux lignes aussi racées que sublimes, et avec une histoire simple et limpide. Tu parles, il a fallu me coltiner des heures de recherches, de traductions, et reboucler entre toutes les différentes infos plus ou moins aléatoires, trier, mettre tout en ordre… Je peux vous dire que j’en ai appris autant sur la marque que sur cette A6G/54 à l’histoire aussi passionnante qu’enrichissante.
© RM Sotheby’s – Gooding & Company