Lotus Elise GT1 – Même chez Lotus on essaye de l’oublier !
par Thierry Houzé | 10 novembre 2024 | Racing |
Vous aussi vous pensiez que la Lotus Elise de 97 c’était une sportive aussi compacte que légère, taillée pour chasser les trajos en misant sur son poids plume et un moteur pétillant sans pour autant déborder de puissance. Du pur light is right… Eh bien vous allez voir que la Lotus Elise, une fois passée en mode GT1, elle devenaitt une sorte de monstre aussi brutal qu’impressionnant…
Du BPR au FIA GT
Retour en 96. Le BPR vit sa dernière année. Né en 94 d’une initiative de Jürgen Barth, Patrick Peter et Stéphane Ratel, il va rapidement devenir la référence de l’endurance, à tel point que pour la saison 97, il passe sous le contrôle de la FIA qui va en faire le Championnat FIA GT. La grosse modif va venir de la règle d’homologation des GT1…
Un sacré bordel !
A l’époque, en GT, c’est le bordel. Chaque fédération y va de son règlement avec l’ACO et ses 24h du Mans en guise de chef d’orchestre. En gros, chaque constructeur fait homologuer ses voitures pour le Mans (sachant que l’ACO n’était pas avare en dérogation !) puis cherche ensuite un championnat dans lequel elle pourra participer. Et le choix est large entre le BPR, l’IMSA (USA), le Super GT (Japon), le BRDC (Angleterre), le CIGT (Italie) ou encore dans différents championnats nationaux.
Nouvelle homologation pour le GT1
En reprenant le contrôle, la FIA va tenter de mettre de l’ordre tous ces différentes homologations afin d’uniformiser les classes et catégories. Il faudra attendre la saison 2000 pour voir une véritable homogénéité internationale. Quoiqu’il en soit, dorénavant, pour homologuer une voiture en GT1 dans le FIA GT il faudra dorénavant que la voiture découle d’un modèle routier produit à 25 exemplaires.
Si l’ACO s’y met…!
Entre 97 et 2000, ça va rester un flou artistique. Pour les 24h du Mans, l’ACO va reprendre les mêmes catégories tout en assouplissant l’homologation GT1. En gros, si tu veux courir le championnat du Monde de la FIA, il te faudra 25 routières. Si tu veux juste participer aux 24h, alors une voiture homologuée dans un championnat national suffira. Ou alors demander une dérogation. Dans tous les cas, les constructeurs vont jouer du règlement et c’est pour cela que d’un côté, on aura les Venturi 400 GT, McLaren F1, Mercedes CLK GTR et Porsche 911 GT1 et de l’autre, les Toyota GT One, Nissan R390, Panoz Esperante GTR-1, la Lister Storm ou encore la Lotus Elise GT1 dont les versions routières (souvent uniques) ne seront que des leurres… En 99, la catégorie GTP vient remettre un peu d’ordre dans ce bordel !
Question de budget
Bien entendu, les constructeurs préféraient largement partir d’une de leur sportive plutôt que de développer une série limitée de voitures spécifiques qui, malgré des tarif prohibitifs, ne couvriront jamais les couts de développement exorbitants. En faisant exception de la McLaren F1 conçue à la base comme une supercar mais dont l’ADN en fera machine exceptionnelle, seuls Mercedes et Porsche tenteront le drop et joueront le jeu des 25 exemplaires.
Made in Proton
Chez Lotus, la situation est tendue. La marque a été racheté en 93 par l’homme d’affaire italien Romano Artioli, déjà propriétaire de Bugatti. Le temps de lancer le projet de l’Elise qui apparaitra sur le marché en 96, il revend une majorité de ses parts à Proton, un constructeur malaisien.
Light is right
L’Elise reprend la recette qui a fait la réputation de Lotus. C’est une petite sportive dépouillée qui affiche 120 ch pour moins de 750 kg. Un vrai jouet aussi performant qu’efficace et envoutant, pour seulement 165000 Frs, hors options. Le succès est immédiat, l’Elise va sauver Lotus et devenir après 25 ans de carrière, la voiture la plus vendue de la marque avec plus de 35000 exemplaires produits… dont une GT1 !
Après l’Esprit
Car c’est elle qui nous intéresse. Au milieu des 90’s, la sportive de la famille, c’est l’Esprit. Elle coure aussi bien en GT3 qu’en GT2. En 96, équipée de son nouveau V8, elle ira même jusqu’au GT1. Mais sans réelle réussite. Sa conception est trop ancienne, trop dépassée. La petite Elise et sa coque en alu arrive à point nommé.
Sous hormones
Si la plateforme est conservée, tout le reste est remplacé. Les trains roulants à double triangulation sont renforcés. La suspensions est signée Öhlins et le freinage fait confiance à de l’AP Racing. Tout est réglable. L’ensemble est posé sur des jantes Speedline de 17″ devant et 18″ derrière. L’ensemble est coiffé d’une coque en carbone. Si on reconnait l’Elise, plus longue, plus large, plus basse, on s’dit qu’elle a abusé de la testo. La queue est allongée, l’aéro est optimisée tout comme le refroidissement. Les vitres en lexan sont fixes. La version routière présentée s’affiche en noir… elle est impressionnante de bestialité.
V8 Chevy
Derrière le cockpit qui se contente de conserver seulement l’essentiel (mais c’était déjà le cas sur la version d’origine…!), on retrouve le V8 passé en monoturbo repris à l’Esprit GT1. Boosté à 550 ch, il est associé à une boite 6 manuelle Hewland. Mais, sur les Elise engagées de compétition (trois voitures « usine » et deux pour le team GBF), on a préféré miser sur la fiabilité d’un V8 LT5, le 5.7 l 32 soupapes de la Corvette C4 ZR1, revu par les ingénieurs anglais à qui ils ont de lui greffé une paire d’escargots KKK pour le faire grimper à 600 ch. Avec tout juste 1000 kg sur la balance (règlement oblige !), elle est prête pour entrer en jeu pour le championnat FIA GT qui débute à Hockenheim en avril 2017.
Quand ça veut pas…
Sur les trois premières courses, une seule des 5 voitures engagées (une du team GBF) verra la ligne d’arrivée. Ce sera à Silverstone et avec 25 tours de retard sur le vainqueur…! Aux 24h Mans, une seule voiture sera engagée. Mais ce sera l’abandon au 121ème tour. Le reste de la saison sera identique… Les quelques Elise GT1 qui verront la ligne d’arrivée, la franchiront loin derrière les références de la catégorie, au milieu des GT2. Au terme de la saison, Lotus stoppe le programme GT1 en ayant assemblé une seule Elise GT1 routière (comme quoi c’était bien le bordel au niveau de règlement !).
Tombée dans l’oubli
Finalement, l’Elise était bien plus à l’aise dans les show room ou sur une petite route sinueuse. Puis l’histoire montrera que l’échec de la GT1 n’a pas pénalisé le reste de sa carrière… bien au contraire. Quasiment tout le monde l’a oubliée !