Aujourd’hui c’est poésie mécanique avec passage en mode vieux con à la sauce « c’était mieux avant ». Retour à une époque où les caisses de course misaient d’abord sur la légèreté et la simplicité pour garantir le spectacle avec, dans le rôle de la reine de la catégorie, la Lotus Elan 26R. Une bestiole aussi légère que… méchante !
Aujourd’hui, on vit à l’ère de la fiche technique et du passage en force. Y’a qu’à voir les compactes sportives qui se targuent d’afficher des performances associées à un comportement dignes d’une supercar du siècle dernier. Imaginer qu’une F40 puisse se faire poutrer par une RS3 moderne, ça fout quand même la ch’touille. Même si les émotions et les sensations sont très loin d’être les mêmes (heureusement, l’honneur est sauf !) et que l’électronique vient canaliser la fougue de l’engin et faire croire à celui qui tient le volant que c’est un véritable pilote.
Mais bon, comme me le répète assez souvent Tim : « Hé papy, faut vivre avec son temps ». Ah ok… m’enfin j’préfère quand même me mater une course de DTM ou de BTCC des 90’s, que le dernier GP de Formula E ! Faut pas déconner non plus.
Et justement, histoire de retourner dans l’passé en se disant que c’était quand même bien avant, j’vous ai trouvé une digne représentante de cet esprit compet’ qui voulait que l’essentiel c’était d’abord l’agilité et le poids avant la puissance absolue. La preuve donc avec cette Lotus Elan 26R de 1966.
Bon, quand tu dis Lotus, tu poses déjà les jalons. Tu sais que ça pas peser bien lourd. En tout cas pour la 26R, on reste en dessous des 600 kg… 580 pour être précis. A la base, l’Elan, c’est un roadster qui embarque un 4 cylindres Ford mais revu et corrigé par les sorciers de chez Lotus. Née au début des années 60, elle doit renflouer les caisses de la marque, mises à mal par l’Elite… prouesse technique (caisse autoporteuse en fibre), mais véritable échec commercial. Colin Chapman décide de revenir aux fondamentaux, c’est à dire un châssis poutre avec coque en fibre. On y greffe une double triangulation à l’avant pendant que l’arrière s’appuie sur un triangle avec MacPherson. Quatre freins à disque et un transmission au roues arrière via un pont Rotoflex, une technique issue de la compétition.
Une carrosserie au dessin simple mais élégant et sportif, avec deux phares pivotants. Un cockpit aussi sobre que bien pensé. Un 4 cylindres double arbres bien énervé dans les tours pour remuer les 680 kg de la version civile et le coup était joué. Et bien joué. Quand l’Elite avait péniblement trouvé un peu plus de 1000 clients sur 6 années, l’Elan en séduira plus de 14200 (en 11 ans de carrière) ! Si la S1 fera office de coup d’essai en 62 avec un 1.5 l de 100 ch, passé rapidement en 1.6 l pour 105 ch, après seulement 22 voitures produites ce sera finalement la S2 qui lancera réellement la carrière commerciale de l’Elan à partir de 63.
Et à l’époque, qui dit Lotus, dit aussi sport auto et notamment F1, avec un Jim Clark qui va aider la marque à rafler le doublé pilote et constructeur en 63. Forcément, la petite Elan ne va pas échapper à son destin en devenant 26R. Pourquoi 26 ? Eh bien parce que la même année, Lotus avait aligné sa nouvelle F1, la Lotus 25… c’était simplement pour suivre une hiérarchie dans la codification des voitures de compétition, et ce, malgré le fait que l’Elan ne sera engagée exclusivement par des teams privés, l’écurie officielle Lotus préférant se focaliser sur la F1.
En tout cas, ça n’empêchera pas l’Elan 26R de devenir une redoutable machine à victoires. Le châssis va être allégé et renforcé, les suspensions et le freinages sont revus et on voit débarquer des barres satb’ réglables. La caisse aussi a droit à un bon régime. Seul l’essentiel est conservé. Un hard top vient apporter de la rigidité et les originaux phares rotatifs sont remplacés par des modèles fixes sous plexi. Les roues en 13″ passent sur des moyeux à écrou central. Le 4 pattes est poussé dans ses retranchements, Lotus proposant à ses clients le choix entre une préparation Cosworth ou BRM. Carbus Weber 45, culasse 8 soupapes retravaillée, refroidissement, admission et échappement optimisés pour passer à 150 voire 175 ch selon les réglages choisis par le client. Avec seulement 580 kg à trimbaler inutile de vous dire que la Lotus Elan 26R était capable d’aller en remontrer à des plus puissantes qu’elle. D’autant plus qu’au delà de son poids plume, elle affichait une agilité exceptionnelle, jonglant entre le levage de jambe et les déhanchés endiablés, sans jamais être nerveuse ou piégeuse. Une vraie ballerine affutée comme un mercenaire pour aller chasser les Porsche, Alfa Romeo, Sunbeam et autres Jaguar.
97 Elan 26R auraient été produites, achetées par des teams privés comme le Walker Racing, Chequered Flag ou encore Willment, enchainant les victoires et les titres. En 66, elle remportera le championnat AutoSport britannique avec 15 victoires sur les 20 épreuves de la saison. Une prouesse qui permettra à son pilote John Miles de devenir pilote officiel dans le team Lotus F1.
60 ans plus tard, la Lotus Elan 26R reste toujours aussi rafraichissante. La voir sauter de courbe en courbe sur le circuit de Goodwood ou de Silverstone reste un moment de pur plaisir. Son gabarit sorti d’un autre temps la rend quasiment unique. Et son look fun en fait une des sportives de sa génération des plus sympathiques. Quelques années plus tard, l’Elise reprendra et modernisera la recette originelle, avec tout autant de succès… comme quoi, on a beau chercher à en faire toujours, mais plus c’est simple, plus ça plait !
Oh putain ! Fernande…
Tout dans la pureté!!!