L’histoire est faite d’anecdotes et de choix… Comme ce jour où Nissan a décidé au dernier moment de laisser tomber le projet d’un coupé sportif né sous le crayon d’Albrecht « Graf » Goertz avec un châssis étudié par Yamaha. Projet que rachètera Toyota en recherche d’image… Et qui deviendra la 2000 GT !
Pour donner du style à ce coupé 2 places sportif, Albrecht « Graf » Goertz, qui avait déjà tracé les lignes de la somptueuse BMW 507, s’est inspiré de la référence européenne de l’époque, la Jaguar Type E… Mais au delà du dessin, les proportions sont bien plus compactes, la 2000 GT étant beaucoup plus petite que l’Anglaise. L’avant, long et profilé, tranche avec un postérieur qui se retrouve rebondi avec une lunette bulle et qui s’achève abruptement. Il pourrait faire penser à celui d’une 250 GTO, court, musculeux et paré des ses 4 feux ronds…
Toute comparaison s’arrête ici, car notre japonaise reste mécaniquement bien loin de ses illustres muses. Pour le châssis, Yamaha a misé sur ses 2 classiques, rigidité et légèreté et s’inspirant des Lotus de compétition. Une poutre centrale avec 2 extrémités en « X » une à l’avant pour recevoir le moteur, la 2nde à l’arrière pour le pont. Les 4 roues sont indépendantes mixant leviers triangulaires et trapèzes transversaux sur lesquels viennent se greffer les ressorts hélicoïdaux. 4 freins à disque se chargent de ralentir la fougue de l’engin pendant que Toyota inaugure sa toute 1ère direction à crémaillère signe de précision. Le tout est posé sur des roues Yamaha en magnésium et reçoit une caisse en acier. Au final, le poids reste contenu à un peu plus de 1100 kg.
Sous le long capot, le moteur est également issu de la collaboration entre Toyota et Yamaha. Le 1er fourni un bloc de Crown au 2nd qui va se charger d’y adjoindre des culasses double arbres en alu à chambres hémisphériques. Yahama a l’habitude des moteurs pointus, mais n’a jamais réalisé de 4 temps… C’est donc une 1ère pour le constructeur japonais.
Il en résulte un 6 en ligne de 1998 cm3, gavé par 3 carbus Mikuni-Solex, qui envoie 150 ch et 18 mkg de couple aux roues arrières. Le moteur est souple et onctueux à des régimes usuels, mais sait se montrer hargneux dans les tours, son régime maxi étant perché à un peu plus de 7000 trs. Certains pourraient lui reprocher un manque de watts, mais les performances sont là, aidées par un poids contenu. Le 0 à 100 est abattu en 9 secondes alors qu’il en faut 20 de plus pour passer la borne kilométrique. Aujourd’hui ça peut faire sourire, mais en 1966, ça permettait de se chauffer une 911 ou une Corvette !
Toyota a énormément misé sur sa 2000 GT en terme d’image, l’objectif de la voiture étant de poser les jalons du constructeur à l’international… Pour ce faire, en octobre 66 (Avant sa commercialisation officielle) une 2000 GT préparée est posée sur la piste de Yatabe. 3 jours de roulage non stop pour, au final, ramener 10 records internationaux et 3 records mondiaux de vitesses. En parallèle, la voiture est engagée en endurance au Japon et remporte les 1000 Km de Suzuka la 1ère année en 66 et, l’année suivante, les 500 km de Suzuka, les 1000 km de Fuji avant de réaliser un doublé à la course de 24h sur le même tracé.
En 68, la sportive monte d’un cran et rejoint les USA pour aller se frotter à l’élite internationale en SCCA. C’est Carroll Shelby qui va s’occuper des japonaises… pour leur faire remporter 3 courses sur les 14 que compte la saison, et terminer à la 2ème place au général juste derrière Porsche ! Impressionnant pour une 1ère et seule participation puisque la marque ne reconduira pas son engagement en 69.
En 67, elle aura même les honneurs d’Hollywood pour devenir l’un des engins de l’agent secret le plus connu de la planète, James Bond. Pour l’anecdote, l’habitacle réduit de la sportive ne pouvait recevoir l’attirail de caméras ainsi que le gabarit de Sean Connery. Toyota, ne voulant pas rater un tel coup de pub, proposa alors à la production de lui enlever le toit pour en faire un targa. Mais l’acteur dépasse toujours du pare brise, obligeant le constructeur à improviser dans l’urgence 2 spiders sans capotes, que Sony se chargera d’équiper de plusieurs gadgets. L’un sera détruit, le 2nd est aujourd’hui exposé au musée Toyota au siège de la marque.
La 2000 GT aura eu une carrière courte mais retentissante. Apparue dans les show rooms en 67, elle tire sa révérence 3 ans plus tard. Au niveau de la prod, plusieurs chiffres s’opposent, 337 exemplaires pour les uns, 351 pour les autres… Quoiqu’il en soit, la 2000 GT est aujourd’hui rentrée au Panthéon des sportives, et en acquérir une est désormais synonyme de budget à 7 chiffres… Les dernières qui ont changé de main ont été adjugées pour plus d’1 million d’€… Le prix de la rareté et de l’exclusivité, même pour une Toyota !
© GoodingandCompany / desert-motors via Patrick Ernzen
Une vraie voiture de rêve !!
Et au passage, merci pour l’histoire du modèle !