Il y a quelques années, je vous avais parlé de l’Alpina B10 3.5 E34… Un gros bestiaux atmo qui, une fois passé entre les mains des sorciers de Buchloe, gagnait une quarantaine de chevaux et un look plus viril. Il était temps de passer à sa soeur un peu plus épicée, l’Alpina B10 Biturbo… qui, comme son nom l’indique, embarque deux escargots qui la rendent bien plus méchante… ambiance !

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Nous sommes en 1989… c’est important de s’en rappeler. A l’époque, les berlines sportives se démocratisent doucement mais ça reste surtout pour pouvoir tirer une homologation. Depuis le milieu des 80’s, les Mercos 190 2.3, BMW M3 et Ford Sierra Cosworth mettent aussi bien le feu sur la route que sur les circuits.

De son côté, BMW a déjà fait fort avec la M5 E28 et son moteur issu de la compet’. Mais les initiatives restent encore timides. Puis quand la E34 débarque en 87, à Munich, on a bien l’intention de donner une descendante à la berline familiale. Surtout qu’il se murmure que Mercedes préparerait une réponse en s’étant rapproché de Porsche… et qu’Opel aussi serait allé voir chez Lotus s’il n’y avait pas moyen de booster un peu l’Omega

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La M5 E34 débarque donc en 88 au salon de Genève avec désormais plus de 300 ch sous le capot. Un an plus tard, Alpina B10 3.5 atmo arrive elle aussi à Genève mais surtout, à ses côtés, sa soeur jumelle B10 Biturbo… et là, le constructeur de Buchloe envoie du très lourd, se permettant au passage de mettre une grosse claque à la M5. Un pacte de « non agression » est passé entre le constructeur et le « préparateur »… qui doit se contenter des anciens blocs. C’est comme ça, BMW veut bien qu’Alpina se positionne en face, mais les conditions sont bien précises, à prendre ou à laisser. Sauf que malgré le bloc d’ancienne gen’ rien n’empêche après les ingénieurs de se lâcher… comme en y greffant un duo de turbos.

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Quand la BMW M5 affiche fièrement ses 315 ch, l’Alpina B10 vient lui damner le pion avec 360 canassons sous son capot. Quand la M5 est limitée à 250 km/h, l’Alpina B10 en annonce 289. Enfin, quand la M5 mise sur un look « sport chic » à 500.000 balles, l’Alpina B10 se la joue psychopathe de la file de gauche pour « seulement » 100.000 de plus ! 

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L’Alpina est une… Alpina ! Kit complet, stickers dorés, ligne inox avec double sortie, jantes alu en 17′. Elle en impose plus qu’une M5 d’origine, mais paradoxalement, si ce n’est le logo sur la calandre (En option), rien ne la distinguait de sa soeur atmo.

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Dans l’habitacle, c’est baquets Recaro avec sellerie au choix… Soit un cuir de buffle, soit le célèbre tissu anthracite avec liseret vert. Le placage en noyer vernis est spécifique à l’Alpina et un volant Momo vient compléter le tableau. Pour le reste, c’est l’équipement d’une 535i puisque n’oublions pas que la base, c’est elle. Par contre le tachy’ est mis à jour… 320 km/h en Vmax et une console électronique pour pouvoir surveiller la pression et la température d’huile, celle de l’huile de refroidissement ainsi que la pression du turbo. 

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Sous le capot, le 6 en ligne 3.5l d’origine affiche 211 ch. Une fois retouché par Alpina, mais laissé en atmo, il passe à 254 ch. Enfin avec ses deux escargots qui lui soufflent dans les conduits, il balance 360 ch sur les roues arrière. Et pour y arriver, les pistons sont forgés et les chambres de combustion revues. La culasse reçoit de nouvelles soupapes refroidies au sodium et des arbres à cames plus pointus. L’admission et l’échappement sont entièrement changés tandis que l’injection est spécialement développée par Bosch. Enfin, les ingénieurs ont préféré choisir deux petits Garrett T25 afin de privilégier la charge à bas régime et éviter le lag. Ils sont refroidis par huile et Alpina a jugé bon de rajouter un circuit d’eau secondaire alimenté par un pompe électrique qui se met en route à l’arrêt du moteur. 

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Au niveau de la transmission, là encore Alpina n’a pas fait les choses à moitié. La boite Getrag est spécifique, avec des débattement courts, précis et fermes, elle offre 5 rapports parfaitement étagés. L’embrayage est un Fichtel & Sachs renforcé et un autobloquant vient donner un coup de pouce aux roues arrière… et elles en ont bien besoin !

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Sachez qu’en 89, l’électronique ne faisait pas encore croire au gars qui tournait le volant qu’il était un pilote émérite ! Surtout sur ce genre d’engin… Généralement, quand tu te foirais et que tu ratais ton estimation testiculaire, tu le payais cash… les plus chanceux terminaient dans un champs, les autres, dans une boite en sapin ! Du coup, Alpina a mis les moyens pour solutionner la problématique de la motricité. Car développer un moteur exceptionnel c’est bien, mais pouvoir l’exploiter, c’est mieux !

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Le préparateur s’est entouré des meilleurs spécialistes… Du coup, le châssis a été développé conjointement avec les ingénieurs de chez Bilstein et Fichtel & Sachs. La hauteur de caisse et la dureté des suspensions sont pilotées par un ingénieux système composé de sphères où la pression du circuit d’huile (Le même que les freins et l’embrayage) est régulée en temps réel. Les seules aides sont l’ABS et l’antipatinage. Le châssis maitrise le roulis et la B10 devient d’une efficacité qui n’a rien à envier à sa soeur siglée M Motorsport. Enfin, pour calmer les excès d’optimisme, le freinage est confié à Lucas qui passe les disques à 330mm mordus par des étriers 4 pistons. 

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L’Alpina B10 Biturbo est plus un pullman ultra rapide qu’une sportive pure et dure. Efficace, elle enroule sur le couple en offrant des performances de 1er ordre… le 0 à 100 est expédié en 5,6 secondes, les 400m sont shootés en 13,6 et la barre du kilomètre 25. De quoi énerver les proprios des supersportives de l’époque, Ferrari 348, Porsche 930 turbo… et même Countach et Testarossa. 

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Alpina aura pris un gros risque… Le développement de la B10 Biturbo a couté plus de 3,2 millions de Dollars et pour l’amortir il va falloir en vendre plus de 30… Pari osé ! Et largement gagné… puisque 507 Alpina B10 Biturbo sortiront des usines de Buchloe ! Une véritable prouesse pour un constructeur de la taille d’Alpina et une voiture qui a marqué les esprits pour devenir un véritable collector et entrer au Panthéon automobilesque… 

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© Enes Altun