Sous le nom de Qvale Mangusta se cache en fait la De Tomaso Biguà… Une histoire un peu farfelue pour le constructeur italien qui faisait tout pour essayer de sauver la marque d’une faillite annoncée. C’est justement cette ultime tentative qui aura raison de De Tomaso, de ses ambitions et même de son patron ! J’enfile ma tenue de Père Motor et je suis à vous…

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Au début des 90’s, Alejandro De Tomaso essaye de redonner un second souffle à sa marque… La Pantera est au bout du bout de c’qu’elle peut proposer. En même temps, ça fait plus de 20 ans qu’elle tient la marque à bout de pistons. Sans réelles évolutions, si ce n’est quelques appendices esthétiques, elle accuse son âge et n’attend plus que de prendre une retraite bien méritée. De son côté, pour renflouer les caisses, Alejandro a été obligé de revendre tous ses trésors de guerre… Maserati en 87, Innocenti 2 ans plus tard et enfin Moto Guzzi et Benelli dans la foulée. 

De Tomaso est resté en contact avec Giordano Casarini, directeur technique de Maserati, désormais propriété de Fiat. C’est lui qui conseillera à Alejandro de lancer la Guara, une supersportive qui reprend le concept abandonné de la Maserati Barchetta, motorisée d’abord par BMW puis par Ford. La voiture trop chère aura du mal à trouver sa clientèle. Puis le temps de la sortir en 93, Alejandro De Tomaso s’est déjà focalisé sur un autre projet.

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Alors qu’il se rend en Angleterre en compagnie de Giordano, ils découvrent la TVR Griffith 500, un petit roadster, compact, léger, et motorisé par un V8 Rover revu pour passer à 5.0 l et sortir 325 ch. Les deux hommes sont séduits. A leur retour en Italie, un projet à bien entendu germé dans leurs cerveaux, celui de proposer une TVR made in De Tomaso… Un roadster sportif, accessible, envoutant, fiable et avec une ligne attirante. 

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Casarini quitte Maserati pour rejoindre De Tomaso et tous deux se lancent dans le développement de cette nouvelle et ambitieuse voiture. Afin de limiter les couts, De Tomaso envisage d’implanter un V8 Ford, le 4.6 l de 320 ch… la marque américaine est d’abord sceptique, mais quand à Détroit on apprend que les italiens ont entamé des discussion avec Holden, on finit par accepter de fournir le moteur et la boite.

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Pour le châssis, De Tomaso va à nouveau faire appel à Enrique Scalabroni, un ingénieur qui a bossé en F1 chez Dallara, Williams et Ferrari. C’est lui qui a déjà développé les dessous de la Guara. Enfin au niveau de la ligne, c’est Marcello Gandini qui s’y colle… surement en manque de vacances quand il a pris le crayon ! Ah c’est sûr que le dessin « a du caractère »…  on aime ou pas, mais en tout cas, il ne laisse pas indifférent. Les panneaux de carrosserie vont être réalisés en RTM, une résine thermo-moulée qui permet de combiner rigidité et légèreté. Même si au final la voiture va quand même afficher 1450 kg sur la balance !

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Enfin quoiqu’il en soit, la De Tomaso Biguà débarque au salon de Genève en 1996, sans que la marque ne sache comment la produire. La Guara ne se vend pas, les caisses sont vides et pour ne rien arranger, Alejandro commence à rencontrer quelques problèmes de santé. Si la Biguà veut exister, il va falloir trouver un partenaire financier. 

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De Tomaso se tourne en priorité vers l’état italien qui va rapidement refuser de miser le moindre centime ! Du coup, il tente un coup de poker en prenant contact avec la famille Qvale. Kjell Qvale est un homme d’affaire d’origine norvégienne installé aux USA, où il a été pendant de nombreuses années l’importateur exclusif de Maserati et De Tomaso mais aussi le propriétaire de la marque Jensen (Qu’il conduira à la faillite en 76 !). 

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En tout cas, l’offre d’Alejandro séduit Bruce Qvale qui réussit à convaincre son père. Tous deux voient à travers le projet De Tomaso l’occasion de faire c’qu’ils ont raté avec Jensen… Kjell signe le chèque et Bruce repart à Modène avec Alejandro. Mais rapidement l’histoire part en couille ! De Tomaso veut bien que Qvale balance la monnaie, mais ne compte s’entendre dicter les règles par les américano-norvégiens. De leurs côtés, les Qvale veulent changer le nom de la voiture pour l’appeler Mangusta en référence au petit coupé commercialisé à la fin des 60’s, puis aussi un nom évocateur puisqu’ils ont envie d’attaquer à nouveau le marché américain alors qu’Alejandro veut déjà sauver sa marque ! 

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En 97, les Qvale, père et fils, créent la Qvale Modena SpA et peu à peu Alejandro perd toute la maitrise du projet. Deux ans plus tard, la première Mangusta est finalisée avant de plonger dans le grand bain en janvier 2000 lors du salon de l’auto de Los Angeles en tant que De Tomaso Mangusta. Sauf qu’Alejandro qui s’est alors tourné vers l’étude d’une nouvelle Pantera, va se rappeler à leurs bons souvenirs et illico, il quitte le projet Mangusta, s’oppose et refuse que les Qvale utilisent son nom. 

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Les Qvale sont donc obligés de lancer la voiture sous le nom de Qvale Mangusta… même si les tous premiers modèles déjà assemblés (Les plus recherchés aujourd’hui) garderont le logo De Tomaso sur le capot malgré la marque Qvale posée sur leur postérieur. 

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Au final, Qvale n’est pas De Tomaso, et au niveau des ventes, ça change tout ! Sans notoriété, difficile de vendre une voiture sur un marché qui justement, apporte énormément d’importance à l’image et au prestige. Et une initiative à la base louable (La survie de De Tomaso quand même !) devient une caricature économique ponctuée par un soupçon de marketing et beaucoup de mégalomanie ! L’aventure est quasiment mort-née et à l’image de leur échec avec Jensen, les Qvale réussissent à rééditer leur exploit en tuant une deuxième marque… Entre 2000 et 2001 Qvale produira 284 Mangusta avant de tirer définitivement le rideau. De son côté, Alejandro De Tomaso tombe grièvement malade, il abandonne l’idée d’une nouvelle Pantera. Il décède le 21 mai 2003 et un an plus tard, sa marque est mise en liquidation. 

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Quant à la Mangusta, alors qu’on croyait sa carrière définitivement terminée, elle connaitra un second souffle quand le groupe Rover-MG rachète Qvale… Mais ceci est une autre histoire !

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