En 1987, les visiteurs du salon de Francfort n’ont d’yeux pour deux nouveautés. Sur le stand de BMW, la Z1 impressionne avec un look en adéquation avec sa technologie. Chez Ferrari, la F40 met tout le monde d’accord pour le 40ème anniversaire du Cavallino. Pendant c’temps là la Treser TR1 essaye de se faire une place au soleil…
Difficile de se faire un nom quand tu pars de quasiment rien. Ils sont un bon paquet d’ingénieurs passionnés à avoir tenté le coup. ‘Tention je ne vous parle du tuner qui se sert chez un constructeur pour y ciller son badge. Non, je vous parle de celui qui part d’une feuille blanche et qui se développe son châssis, puis dessine et conçoit la carrosserie qui va l’habiller avant de se frotter aux réalités industrielles et à l’épreuve de l’homologation. Ok, le moteur est souvent acheté à un constructeur, mais ça n’empêche que la démarche est un vrai parcours du combattant avec les yeux bandés et les bras scotchés dans l’dos.
Ils sont plusieurs à avoir tenté le drop, mais très peu être allé jusqu’au bout de l’aventure. Certains s’y collent encore à l’heure où je tape ces mots sur mon clavier, multipliant les coups de comm’, les appels aux dons ou cherchant à enclencher des pré-commandes qui sont plus longues à arriver les dettes qui s’accumulent !
Au salon de Francfort 87, celui qui y croyait, c’était Walter Treser. Un ex pilote pro de chez Auto Union et Alpina, devenu pilote d’essai chez Pirelli puis directeur du service compétition d’Audi, sous la houlette de Ferdinand Piëch, avant de voler de ses propres ailes en 82 en fondant sa société Walter Treser GmbH Automobiltechnik und Design, spécialisé dans le développement de pièces perf pour VW et Audi mais aussi capable d’étudier des projets spécifiques. Mais tout ça je vous l’ai déjà raconté plus en détail lorsque je vous ai parlé de son Audi Quattro roadster.
En gros, en 1982, Walter est devenu tuner. Un de plus dans les 80’s. Si ce n’est que Treser a toujours eu une idée en tête. Donner naissance à une sportive à l’esprit jeune, une sportive dynamique, simple et accessible. Ouais, souvent leurs histoires commencent comme ça. Mais voilà, Walter va aller au bout de ses rêves, et créer Walter Treser Automobilbau GmbH afin de développer sa propre voiture qu’il va baptiser Treser TR1.
Il faudra deux ans de boulot à Walter et son équipe pour accoucher d’un proto suivi de deux voitures de pré-production, une rouge et une noire, qui seront exposées au salon de Francfort 87.
La voiture repose sur une plateforme centrale inspirée de l’aviation et conçue avec l’entreprise Hydro Aluminium. Elle s’appuie sur une structure en alu extrudé et composite afin de garantir rigidité et légèreté. Un concept qu’il fait breveter sous le nom d’AVUS sur lequel il a greffé deux essieux avant de Golf 2 GTi 16s avec trains roulants, direction, suspensions et freinage. Deux ? Oui, un pour l’avant et un deuxième, tourné à 180° pour l’arrière. Sachant qu’en y étant, il a gardé le 4 cylindres 16s de 139 ch associé à la boite 5 manu pour en faire donc un roadster avec moteur central arrière. Viennent ensuite les éléments en fibre de la carrosserie avec un toit qui s’escamote derrière les deux sièges. En avance sur son temps le père Treser !
Le cul est large, l’avant affuté doté deux deux phares pop-up dont les coques glissent vers l’arrière. Le style est dynamique et agréable. J’aurai pu dire inspiré par la Lotus Elan M100, si ce n’est le roadster anglais montrera le bout de sa calandre que deux ans plus tard… alors j’n’ai rien dit !
D’autant plus qu’avec 1028 kg sur la balance, pour 139 ch, la promesse s’avère séduisante. Et pour revendiquer l’image sportive de sa TR1, Treser vide les comptes et entre avril et mai 1988, il fait assembler 20 voitures, sans toit ni vitres latérales mais toutes équipées d’un arceau et d’un moteur préparé à 170 ch, et trouve des acquéreurs pour les inscrire dans un formule monotype, la Hydro Aluminium Sports Car Cup.
Les trois premières épreuves ont lieu sur les circuits de l’Avus, du Nürb et au Salzburgring, avant que le coup de semonce ne tombe. Walter Treser avait planifié une production de 1500 voitures par an. Il avait levé un groupe d’investisseurs qui allaient permettre d’assurer la sérénité et pérennité… mais voilà, ces investisseurs se désistèrent et les caisses vides, sans avoir le temps de trouver un alternative, Walter n’a d’autre choix que de déposer le bilan en aout 88. L’affaire est malheureusement pliée, et les entreprises Treser tirent le rideau. En guise d’hommage, Hydro Aluminium organise une dernière course en septembre 88 à Lankebanen, en Norvège.
Aujourd’hui, des amoureux de la Treser TR1 se sont regroupés afin de retrouver les différentes voitures assemblées. La production compte le proto, les deux modèles exposés à Francfort, les 20 versions courses, mais aussi deux voitures en cours d’assemblage mais non achevées lorsque l’entreprise a fermé. Quand ils réussissent à mettre la main sur l’une d’elles, elle est remise en état et civilisée avant d’être homologuée.
C’est le cas du modèle noir que je vous ai trouvé, devenu le show car d’Oxigin, une marque de jantes allemande. Quant à Walter Tresen, après sa mésaventure, il est passé par un fabricant de sièges allemands puis s’est retrouvé à la tête du service compétition d’Opel en 91 où il oeuvré à la campagne DTM puis ITC de la Calibra. En 2003, il a pris une retraite bien méritée puis a lancé ce fameux Club Treser en 2005. Il nous a quitté en novembre 2021 à 81 ans.
Jolie histoire méconnue d’un artisan légitime qui gagnerait à être d’avantage « sous les feux de la lampe », comme on dit!!!