Quand elle débarque en 72, l’Alpine A310 avait tout pour devenir une GT capable d’aller chasser les teutonnes aussi bien sur les petites routes sinueuses que sur la file de gauche de l’autoroute. Mais voilà, entre un contexte économique compliqué et un flagrant manque d’ambitions, il va falloir attendre plusieurs années avant de la voir équipée d’un V6, puis du Pack GT et enfin d’un certain kit Boulogne… explications.

Difficile d’aller concurrencer les références sportives avec un 4 cylindres 1.6 l situé entre la banquette et le pare-choc arrière. Si ça marche sur une ballerine comme la Berlinette A110, c’est plus compliqué sur l’A310 qui se veut monter d’un cran et aller chasser sur les terres des GT allemandes et anglaises.

Ce Cléon Alu, emprunté à la R16 TS, gagne quelques cm3 et voit débarquer un nouvel arbre à cames, de nouvelles soupapes d’échappement, deux doubles corps Weber 45 DCOE et une nouvelle ligne pour développer 125 ch. Pas d’quoi tirer un feu d’artifice ! Heureusement l’A310 est légère. Avec 930 kg sur la balance, ça rattrape. Le 0 à 100 est signé sous la barre des 9 secondes. Les 400 m sont franchis en 15,9 et le kilomètre en un peu moins de 30. C’est correct même D’autant plus que niveau tenue de route et efficacité, c’est du sérieux… de l’Alpine quoi ! Et justement, ça amplifie ce sentiment de frustration en mettant en avant le manque de watts que la sportive tricolore aurait pourtant bien encaissé.

Pour cela, il faudra être patient… en effet, si le 4 cylindres évolue en voyant arriver l’injection en 73 (sans pour autant gagner le moindre cheval), ce ne sera qu’en 76 que Renault (désormais propriétaire d’Alpine) validera enfin une restylage de l’A310, mais surtout, l’arrivée du V6 PRV 2.7 l sous son capot en lieu et place des 4 pattes. La puissance grimpe à 150 ch, le poids passe la barre des 1000 kg (1018 exactement) et les perfs progressent à coups de dixièmes. Le 0 à 100 tombe à 8,2 quand 7 secondes plus tard elle franchit la barre du 400 m et celle du kilomètre en 28,5.

C’est également à partir de ce moment là que Renault va lancer l’Alpine A310 V6 dans le grand bain de la compet’… rallycross, rallye en Gr.4 et Gr.5 et même en GTP aux 24h du Mans. Afin de répondre aux besoins des homologations, Alpine va faire pousser de la fonte à sa GT. Ailes élargies, aileron, bas de caisse, lèvres… elle reçoit tout l’attirail esthétique pour la rendre plus virile et lui offrir des voies plus larges et de l’appui. Mais aussi, de quoi inspirer Fleischmann, un préparateur allemand qui va alors imaginer un catalogue complet afin d’équiper une A310, des suspensions au freinage en passant par des prépas moteurs (4 ou 6 cylindres), des jantes larges en 15″ signées Gotti et des kits carrosserie.

Tout va partir de là… séduit par le look de l’A310 Fleischmann, l’état major de Renault va signer un partenariat avec le préparateur afin de proposer une série Alpine A310 V6 Pack GT. Le client pouvait alors s’offrir un clone de la Gr.4 mais sans le gazier qui va bien puisque la Pack GT ne s’arrêtait qu’à la chirurgie esthétique. Une frustration de plus pour les aficionados de l’A310 qui se retrouvaient avec une bestiole échappée des circuits, posée sur un châssis incisif mais qui devait se contenter de 150 ch… Quelques 1500 vraies Alpine A310 V6 Pack GT (Type VAA) sortiront des usines de Dieppe. Pour ceux qui avaient déjà craqué pour une A310 V6, Alpine proposa une séance de rattrapage avec la possibilité de faire monter le kit Pack GT par un spécialiste.

Finalement, au niveau puissance, le miracle eut lieu en septembre 83 quand, à quasiment un an de l’arrêt de sa production, l’A310 vit arriver le kit Boulogne. Une initiative que l’on doit à Bernard Pierangeli un passionné de la marque à qui l’on doit l’ouverture du Centre Alpine de Boulogne Billancourt en février 79. A force d’entendre ses clients se plaindre du manque de puissance de leurs voitures, il va imaginer son propre kit. Sur la base d’une Pack GT, l’équipe du Centre Alpine va remplacer le PRV de 2664 cm3 Renault / Alpine par son cousin de chez Volvo qui cube 2849 cm3. Les arbres à cames sont plus pointus, les culasses ont été rabotées afin d’augmenter le rapport volumétrique, le carter d’huile est cloisonné et le V6 est maintenant gavé par deux gros Weber IDA triple corps verticaux de 46 mm montés sur une pipe d’admission spécifique et surplombés d’une boite à air XXL Lautrette alimentée par la gauche et la droite (au lieu d’un seul côté sur la V6 normale). Le V6 expire maintenant via deux lignes indépendantes. L’embrayage est renforcé et dans les ailes, les amortisseurs Koni d’origine sont remplacés par des De Carbon réglables. La taille de la nouvelle boite à air à obligé l’équipe de Boulogne à remplacer le hayon arrière par un capot à persiennes.

Avec 193 ch et 25,8 Mkg de couple, l’A310 Pack GT Boulogne offre enfin des perfs dignes de sont ADN et de ses prétentions. Le 0 à 100 est shooté en 7 secondes, le 400 m en 14,1 et le kilomètre en 26,4. En 83, ça commençait sérieusement à causer et ça plaçait l’A310 au niveau d’une Ferrari 308 GTBi ou d’une Lotus Esprit Turbo. De quoi exploiter pleinement les Pirelli P7 de 285/40/15 qui chaussaient le train arrière de la GT tricolore.

Seulement 27 clients allaient équiper leurs Pack GT du kit Boulogne. Vous pensez bien qu’aujourd’hui, en pleine époque spéculative, une vraie Alpine A310 V6 Pack GT Boulogne a de quoi faire perdre la tête du premier collectionneur venu…. qu’il soit « alpiniste » ou pas.

© YvesPGB via BaT