Je voulais vous parler de la Rolls Camargue… Mais comme on est sur De l’essence dans mes veines, je ne voulais pas non plus le faire comme tous les confrères… forcément ! Donc cette Camargue « Retractable hardtop » (C’est son vrai nom), débarque au bon moment. Mais pour le faire correctement, il m’a fallu aussi ressortir le vocabulaire des 80’s !

La Rolls Royce Camargue, c’est un Ovni dans l’espace du Spirit of Ecstasy ! Certains l’ont jugée comme une erreur de parcours pendant que d’autres l’ont condamnée comme un raté esthétique flagrant, en voulant même à Rolls d’avoir pu valider un tel dessin… Moi, je l’avais au 1/24 de chez Bburago ! Ouais, j’ai toujours été attiré par ces caisses atypiques… C’est marrant, sauf quand tu dois la revendre !

Enfin attendez, quand la Camargue débarque en 1975, son dessin est quand même signé Pininfarina ! Une première chez Rolls qui jusqu’à maintenant, gérait tout en interne. Le châssis est celui de la Silver Shadow, un bébé de 5m20x1m90… Sauf que là, on est sur un parpaing coupé aux lignes taillées à la hache et aux proportions gigantesques. Ah c’est carré, la Carmargue aurait pu être tracée par un designer de chez Ikea ! A l’intérieur aussi d’ailleurs… du bois de partout, mais le point commun s’arrête là. On est chez Rolls Monsieur… pas chez Mr Bricolage !

Sachant qu’il faut aussi remettre la caisse dans son contexte. Si aujourd’hui le luxe se vit dans la pureté du design (La bonne phrase clichée !), au début des 70’s, fallait que ça claque le boule, on avait encore pas trop honte d’exposer sa réussite ! Du baroque dans tous les coins et du kitch à chaque étage… c’était les pattes d’eph’, les lunettes à Polnareff, les couleurs psyché, le disco…  Bref, pour la discrétion, vous repasserez ! 

Donc ne soyez pas étonnés que la Camargue soit tout sauf discrète, équilibrée et conformiste ! Le trait est lourd, l’habitacle est presque vulgaire avec ses 14 vaches, 6 noyers, 25 moutons et 200 kg de chrome. Ajoutez aussi son V8 de 6,75l sous le capot, gavé au carbu quadruple corps Solex qui tête comme un polonais assoiffé. Mais bon, quand tu roules dans la voiture la plus chère du monde (En 75, pour le prix d’une Camargue, on pouvait s’payer 5 Jag’ XJ12, 2 Silver Shadow ou 4 Cadillac Seville !), tu te soucies pas de la vitesse avec laquelle tu vides ton réservoir. D’ailleurs, Rolls ne s’embarrasse pas à annoncer la moindre puissance, juste qu’elle est suffisante.

Il n’empêche que la Camargue, malgré ses excès, son gout discutable, sa ligne outrancière, son intérieur bling bling et ses gadgets comme la brosse en argent dans l’accoudoir arrière, les flasques et les verres, sa clim que Rolls annonçait comme capable de refroidir un petit pavillon, ou encore ses poignées de portes situées à l’arrière, au cas où tu roules en coupé avec chauffeur et que tu veuillez descendre tout seul… Oui malgré tout ça, la Camargue reste le coupé le plus luxueux proposé dans les 70’s et 80’s… et surement le plus WTF de la planète auto ! 

Il connaitra 11 ans de carrière pour 530 exemplaires (+1 sous la marque Bentley) vendus. Et encore, si on enlève les 300 qui ont traversé l’Atlantique vers les USA, les 136 qui ont séduit le Lord anglais, plus 75 qui sont partis en Arabie Saoudite et les 2 commandés par le Shah D’Iran, ça laisse 17 voitures pour le reste de la planète ! Sur la même période, plus de 8400 Silver Shadow sortaient des usines de Crewe !

Enfin les plus observateurs auront remarqué ce modèle blanc au cuir bordeaux qui se la joue avec son toit en mode coupé / cabriolet. Non vous ne rêvez pas, en 2001, il est passé par les ateliers de Niko Sokol à Long Beach, dont la spécialité est de transformer en cabriolet n’importe quelle berline premium Mercedes ou Rolls. C’est le seul Rolls Royce Camargue Coupé / Cabriolet… Voyez que ça méritait qu’on en parle !

© RM Sotheby’s via Robin Adams