Chez AC Cars, on avait connu la gloire, les paillettes et les strass dans les années 50 et surtout dans les 60’s grâce à Shelby qui avait transformé la tranquille Ace en bestiale Cobra. Mais bon, l’histoire n’allait pas continuer éternellement et quand les projos se sont éteints, il a bien fallu remplacer son best seller… C’est là que l’AC 3000ME entre en jeu…

AC 3000ME... Quand ça veut pas, ça veut pas ! 1

Bon entre les deux, il y a eu l’AC 428 appelée aussi AC Frua puisque elle était née d’une collaboration avec le carrossier italien Pietro Frua, auteur entre autre de la Maserati Mistral. La voiture recevait un V8 Ford de 428ci (7.0l) qui développait de 345 à 385 ch selon les versions. Il s’en vendra 81 exemplaires de 65 jusqu’à 1973.

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Mais voilà, dès le début des 70’s, AC Cars cherchait à proposer un modèle bien plus sportif, tendance et moderne. Jusqu’à là, la marque avait misé sur des roadster et GT, mis à part que la mode était en train de passer pour laisser place à des sportives plus racées, efficaces et technologiques, équipées de moteurs central arrière. L’objectif de AC Cars était d’aller poser une roue sur le terrain de jeu d’une certaine Lancia Stratos.

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Afin d’éviter un lourd budget de développement, l’état major d’AC Cars préféra aller chercher un base déjà existante et ça tombait bien puisqu’au London Racing Car Show de 1972, ils avaient remarqué un prototype présenté par Bohanna Stables Company, le Diablo. Peter Bohanna était un ingénieur spécialisé dans les structures d’automobile, il avait entre autre collaboré avec Lola sur le projet de la Ford GT40 puis ensuite sur la T70. Bref, le gars connaissait le sujet ! Même si TVR avait aussi senti le bon coup, ce sera AC qui dégainera le premier en rachetant les droits de conception de la Bohanna Stables Diablo.

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A la base, la voiture s’appuyait sur une coque en fibre, recouvrant une structure tubulaire qui recevait en son centre un petit 4 cylindres de 1.5l avec une boite 5 manuelle d’Austin Maxi. Sauf qu’une fois passée sous le giron d’AC Cars, Austin allait refuser de fournir le moteur. Mais ça ce n’était pas bien grave puisqu’AC Cars comptait bien continuer à profiter de son partenariat avec Ford. Du coup, la voiture recevra un V6 3.0l de 138 ch, celui de la Capri, qui imposera de revoir le dessin du châssis.

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Il n’empêche qu’à l’édition 73 du London Motor Show, le premier proto de la l’AC 3000 allait être dévoilé et présenté au public. Le style de la Diablo n’a quasiment pas changé, avec ce dessin aussi bien racé que compact. AC annonce une production de 10 à 20 voitures par semaine pour un prix de vente entre 3 et 4000 £. Enfin, pour le moment ce n’est que de la théorie car le développement est loin d’être terminé. Le style définitif est validé en 1974 mais en même temps, la voiture échoue son crash test à 50 km/h. Du coup, il a fallu imaginer un nouveau châssis, plus adapté au nouveau bloc et attendre 1976 pour enfin pouvoir passer les tests avec succès.

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Enfin, plusieurs prototypes ont été assemblés afin de terminer la voiture et la passer en pré-prod’ avant qu’elle ne soit lancée dans le grand bain en 78 sous le nom définitif de AC 3000ME (Mid Engine). Sauf qu’en 5 ans, la tendance était passée, les concurrents s’étaient réveillés, le budget avait explosé et la voiture se retrouvait déjà dépassée pour un prix de vente qui tournait maintenant autour des 13 – 14.000 £… bien loin de ce qui avait été annoncé 5 ans avant. Pour ne rien simplifier, les premiers essais allaient s’avérer catastrophique, la voiture affichant un comportement réellement délicat voir dangereux à l’approche des limites.

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Pourtant, cela n’allait pas décourager AC Cars. Le constructeur allait même finaliser le développement d’une version turbo imaginée dès 1975 et qui allait faire grimper la puissance à 200 ch. Vendu en option, le kit allait séduire 19 client à l’esprit kamikaze ! Rew and Rooster Turbos un spécialiste de la suralimentation allait même jusqu’à proposer une conversion biturbo avec 300 ch à la clé !

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Quoiqu’il en soit, au début des 80’s, AC Cars est en pleine déroute. Le développement de la 3000ME a vidé les caisses mais avec moins de 80 voitures vendues, elle ne les a pas remplies. En 1984 AC Cars préfère arrêter l’hémorragie et refile la patate chaude à un écossais du nom de David McDonald en lui vendant les droits d’exploitation de la 3000ME. Le gars se sentant plus fort, il est persuadé que lui réussira à écouler 40 caisses par semaine. Il commence par commercialiser la voiture dans sa configuration originale. Et pendant qu’elles rempliront les caisses (seulement 30 voitures sont vendues !), il demande à ses ingénieurs de développer sa propre version.

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Le mulet sera sa voiture personnelle, sur laquelle il va faire modifier deux bricoles esthétiques, faire remplacer le V6 Ford par un 2.5l Busso Alfa Romeo ainsi que les trains roulants, désormais d’origine italienne eux aussi, puis faire entièrement revoir la suspension dans le but de rendre le comportement de la voiture bien plus exploitable et docile.

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Mais une fois encore, la malédiction de la 3000ME va frapper puisqu’il ne réussira pas à tenir les finances demandées. En juin 85 alors qu’il n’a pas eu le temps de commercialiser sa propre version, il dépose le bilan et son entreprise est mise sous séquestre. AC Cars récupère sa licence pour la refiler à Autokraft, un autre partenaire qui commercialise justement des répliques de Cobra depuis 1982. Mis à part qu’Autokraft n’a absolument rien à carrer d’une voiture qu’il considère comme un échec alors qu’en parallèle, ses répliques de Cobra se vendent et permettent d’entretenir de bonnes relations avec Ford. L’AC 3000ME tombe dans l’oubli le plus total…

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Eh bien tout ça c’est bien malheureux car la voiture affichait un dessin réellement séduisant et original. Finalement, il ne lui a manqué que l’arrivée d’un constructeur sérieux et robuste financièrement pour pouvoir voir le jour en temps et en heure. Pourtant elle y est passé à 2 écrous ! D’une quand Ford à sérieusement réfléchi à en faire une base pour leur projet d’homologation en Gr.B. La marque à l’ovale bleu va se rapprocher d’AC Cars et demander à Ghia de revoir la conception. Deux voitures sont fournies afin d’être modifiées et présentées en tant que concept car à Genève en 81 sous le nom d’AC Ghia. Mais alors qu’elle reçoit un très bon accueil, Ford préfère développer l’Escort RS1700T avant de finalement, repartir sur un moteur central arrière qui donnera naissance à la RS200.

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Son salut aurait pu aussi venir des USA grâce à deux hommes, Steve Hitter et Barry Gale qui se chargeaient d’importer les De Tomaso Pantera sur le sol américain via une boite qu’ils avaient racheté à un certain Ray Geddes. Alors que Bary Gale était parti voir un fournisseur en Belgique, il était littéralement tombé sous le charme de la voiture de ce dernier, une AC 3000ME qu’il avait eu l’occasion d’essayer. Avant de rentrer, il avait fait un crochet par l’Angleterre et avait obtenu le feu vert d’AC Cars pour en obtenir les droits de l’autre côté de l’Atlantique. Il en avait profité pour commander une voiture débarrassée de son moteur et de son ensemble boite pont. Une fois rentré, il allait se mettre à la recherche d’un partenariat pour trouver un moteur. Chevrolet refusa. Puis ce fut au tour de Ford qui leur proposa un 4 cylindres 1.6l. Jugé trop limite, la proposition fut rejetée. Finalement ce sera Buick qui acceptera de fournir un V6.

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Pendant ce temps là, la 3000ME avait été envoyée chez Arkay Incorporated à Hawthorne en Californie, une entreprise gérée par Kas Kastner, un spécialiste de la préparation et de la suralimentation des moteurs, ancien directeur de la compétition pour l’Amérique du Nord pour la Triumph Motor Company. Mais le temps de modifier le châssis et d’y adapter le nouveau V6, Buick va se désengager du projet et annuler son accord. Alors que Hitter et Gale se retrouvent sans solution, la chance va leur sourire le jour où Ray Geddes se rend chez Kastner et aperçoit la voiture. Après avoir vendu sa boite aux deux hommes, Ray avait rejoint l’équipe de Carroll Shelby qui justement, était en train de travailler pour Chrysler et développer un kit turbo pour leur 4 cylindres de 2.2l. Tous les acteurs vont profiter du SEMA pour se rencontrer et un accord va être trouvé pour que Shelby accepte de prendre en charge le projet qui commencera chez Arkay le temps que de nouveaux locaux soient montés à Santa Fe Springs à l’est de Los Angeles.

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Une fois le prototype Shelby ME 2.2 Turbo terminé, Carroll va le présenter à Chrysler dans le but de le commercialiser en série. Le patron n’est autre qu’un certain Lee Iacocca, ancien de chez Ford, et ami de Shelby. Mais voilà, se remettant péniblement de la crise de 79, Iacocca refuse de prendre le risque, préférant miser sur des voitures plus classiques. Une fois encore, la 3000ME devenue ME 2.2 Turbo, restera qu’un projet sans lendemain… Comme quoi, quand ça n’veut pas, ça n’veut pas ! (Surement la meilleure conclusion d’un de mes articles…).

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