Dans les années 60, la marque à abattre, c’est Ferrari. Sauf qu’entre Jaguar, Lamborghini, Ford et Shelby, ça avait de quoi énerver le vieil Enzo qui allait mettre tout le monde d’accord en donnant naissance à la Ferrari 365 GTB/4, plus connue sur le pseudo de Ferrari Daytona… Alors, c’est qui l’patron ?!

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Nous sommes en 1961 quand la Jaguar Type E vient remettre les pendules à l’heure dans le milieu des sportives, réussissant même à impressionner Enzo Ferrari. Deux ans plus tard, c’est un certain Ferruccio Lamborghini qui décide d’énerver le Commendatore. Ce richissime constructeur de tracteurs, client fidèle de Maranello, possède plusieurs sportives au cheval cabré et côtoie le maitre des lieux. Lors d’une de ses rencontres avec Enzo, il ose critiquer l’embrayage de ses 250 GT et se fait aussitôt renvoyer dans ses vingt deux, à coup de « laisse tomber, t’es bon qu’à conduire tes tracteurs, retourne sur ce site spécialiste du portage automobile, tu s’ras gentil ».

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Non pas que Ferruccio soit susceptible, mais voyez, il a beau être matinal, il a mal ! Et histoire de montrer au vieil Enzo qu’il sait conduire autre chose que ses engins agricoles, il décide ni plus ni moins de lancer sa propre marque de sportives, et envoie son taureau chasser le cheval cabré. Et pour en rajouter une couche, il va jusqu’à chercher ses ingénieurs à Maranello et chez Maserati. Dans le lot, il embarque Giotto Bizzarrini, le père spirituel de la 250 GTO. En 64 Lamborghini lance la 350 GT, mais c’est surtout au salon de Turin de 65 que Ferruccio envoie son scud, la Miura. Parait que dans toute l’Italie on aurait entendu le dentier d’Enzo grincer ! Et pour ne rien arranger, en endurance, Ford commence sérieusement a devenir dangereux. Les GT40, engagées notamment par Carroll Shelby, foutent la pression aux V12 italiens.

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J’peux vous dire qu’à Maranello, ça devait raser les murs ! D’autant plus qu’à l’époque, les caisses étaient vides. La course, ça coute cher. Et Enzo, ne voit les choses que par elle… il a bien entendu concédé à développer un gamme de sportives routières, et encore, sous la contrainte d’un certain Luigi Chinetti. Mais cela ne suffit pas pour renflouer les caisses. En 63, Ford a lancé une grosse et couteuse offensive pour essayer de racheter Ferrari. Sans succès… ce qui donnera d’ailleurs envie à Henry Ford II d’aller botter les fesses de l’italien sur son propre terrain. Et contrairement à ce qu’a pu raconter Hollywood, Fiat et la famille Agnelli ne viendront sauver Ferrari qu’en 1969.

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Il faut donc remettre les choses à leurs places et montrer à tout le monde que Maranello est bien la capitale mondiale sur sport auto. Du moins c’est ce qu’ils vont essayer de faire lors du salon de l’auto de Paris en 68 en dévoilant la nouvelle 365 GTB/4, qui vient à elle seule, pousser les 250 et 275 à la retraite. Elle reçoit aussitôt le surnom de Ferrari Daytona en référence au retentissant triplé de la marque lors des 24h de Daytona en 67. Comme son nom l’indique, le V12 Colombo va être poussé à 4.4 l et gavé par une batterie de six double corps Weber 40 pour développer 352 ch à 7500 trs et 431 Nm à 5500 trs. Alors que la moteur reste à l’avant, la boite est elle, rejetée à l’arrière, intégrée au pont, une architecture transaxle inaugurée à Maranello en 63 par la 330 GT 2+2.

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La ligne est majestueuse, les courbes sont signées Leonardo Fioravanti, alors designer chez Pininfarina. Le trait est moderne, capot long, cul court, avec capot et portières en alu ! L’assemblage de la carrosserie va être confié à la Carrozzeria Scaglietti. Référence sur la route, elle part alors à la chasse à la Miura pendant que sur circuit, Michelotto va se charger d’elle alors que les ingénieurs de Maranello vont aller tirer jusqu’à 450 ch des entrailles du V12.

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1284 Berlinetta et 122 Spider vont voir le jour jusqu’en 73 alors que Ferrari revoit entièrement la copie avec la nouvelle 365 GT4 BB. Les 500 premiers modèles de la Daytona reçoivent des phares ronds derrière un bandeau fixe en plexi avant que soient adoptés les phares escamotables sur les 800 derniers modèles assemblés en majorité pour le marché américain.

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C’est l’une d’elle qui défile sous vos yeux. Et si vous êtes observateur, vous avez déjà dû remarquer que quelque chose clochait… Si ce n’est pas le cas, je vous invite à observer attentivement le cul de la bête. Voilà, on y est. La voiture a été achetée neuve au début des 70’s par William Harrah, un riche homme d’affaire et accessoirement collectionneur de caisses sportives. Un peu mégalo sur les bords (et beaucoup au milieu !), il préférait rouler dans des voitures uniques, c’est pourquoi il avait pris l’habitude de les faire modifier. Oui, modifier et Daytona dans le même article, ça fout tous les puristes en PLS (et nous, on aime bien faire chier les puristes !).

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Pour en revenir à notre Daytona (et à nos puristes qui n’en peuvent déjà plus !), William Harrah va s’empresser de l’envoyer en Californie pour la confier à un spécialiste des hot rod, qui va alors lui offrir trois bricoles plutôt subtiles, en l’occurence des roues de version course en 9″ de larges et chaussées en Avon racing à flancs hauts. Pour rendre l’ensemble cohérent, les ailes sont sobrement élargies et le cul légèrement rehaussé. De son côté, le V12 reçoit une p’tite cure de testo, une ligne libéré et passe à 386 ch.

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Pour le reste, rien ne change (Ah, j’en vois quelques uns qui respirent à nouveau !). J’dirais même que la magnifique robe bronze, a tendance à adoucir l’ensemble, tout comme l’habitacle tendu de cuir fauve. La plaque alu qui rejoint les deux clignos avant apporte une sobriété supplémentaire. Par contre, la vue de ce fessier élargi est juste démente !

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William va revendre sa Daytona en 75 à un certain John Robertson qui va avoir un accident à son volant. La voiture va être à nouveau vendue à deux reprises avant de subir une restauration en règle en 2012 et d’être vendue en 2017 chez RM Sotheby’s pour 687.500 $… un chiffre plus qu’honorable puisque ses modifications ne lui ont rien fait perdre de sa valeur.

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Pour info, William Hannah est décédé en 78, laissant derrière lui une collection qui comptait entre autre plusieurs Jaguar, un Hot Rod, deux Ferrari, deux Jeep Wagonner un peu spéciaux, ainsi qu’une Bugatti Type 41, plus connue sous le nom de Bugatti Royale ! A mon avis, vous allez surement bientôt en entendre parler sur DLEDMV !

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© RM Sotheby’s