En pleine tendance spéculative « youngtimerienne », on peut réellement s’étonner que s’il en est une qui a traversée les générations en passant quasiment inaperçue, c’est bien la Rover SD1… Pourtant, la berline anglaise a marqué son époque par son style, sa classe mais aussi, son palmarès ! L’heure de la revanche aurait-elle sonnée ?
La British Leyland, c’est la rencontre de la British Motor Holdings et de la Leyland Motor Corporation. Si ça ne vous dit rien, dites vous que c’est le mariage de Rover et de quelques autres marques anglaises… Jaguar, Triumph, Daimler, Land Rover, Alvis, MG, Morris, Austin, Austin Healey, Mini et quelques autres artisans absorbés par la fusion. L’objectif est simple, aller rivaliser avec les allemandes sur le marché du luxe et du sport.
Pour cela, il faut remplacer les vieillissantes Rover P6 et Triumph 2000 et 2500. Du coup, la British Leyland casse la tirelire et fait construire un toute nouvelle usine sensée accueillir cette nouvelle berline qui va naitre de l’étude des meilleurs ingénieurs anglais. David Bache se charge du design pendant que Peter Wilks puis Spen King s’occuperont de la partie mécanique et châssis. Le projet débute en mars 69, l’architecture est déjà décidée, ce sera une berline avec moteur avant et propulsion. Pour el design, 2 équipes internes sont mises en compétition… que la meilleure gagne ! En 71 le design est enfin défini, et codé RT1 (Rover Triumph number 1) avant d’être rebaptisé SD1 (Specialist Division Number 1).
Le projet traine et prend du temps. le soucis, c’est la nouvelle direction, les changements de managers et de décisions. La direction de Britsh Leyland parie sur 1500 modèles/semaine… le directeur financier estime qu’il en faut 3000 pour rendre le projet viable. Mais tous y croient (Heureusement !) surtout que le dessin est totalement original, avant-gardiste et n’hésite pas s’inspirer de ce qui se fait de mieux à l’époque… Ferrari 365 GTB/4 Daytona, Maserati Ghibli et du concept Pininfarina BMC 1800 « Berlina Aerodinamica ». D’ailleurs, ce concept influencera plusieurs dessins d’auto qui le suivront, notamment la génération des Citroen SM, GS et CX.
Quoiqu’il en soit, c’est en juin 76 que la Rover SD1 sera enfin présentée, directement au pôle de la Leyland. Pour rivaliser avec les allemandes, l’anglaise mise sur un physique futuriste et un positionnement premium. Mais au niveau châssis et mécanique, c’est une autre histoire. La banque d’organe de la British Leyland est étoffée, mais rien n’est vraiment moderne ! Pourtant, en proie à des difficultés financière, les ingénieurs n’ont pas eu le choix de tailler les investissements en composant avec un cout de revient réduit et avec ce qu’on leur proposait. La crise pétrolière qui est passée par là n’arrange pas les choses !
Pourtant, la berline est exclusivement équipée du V8 3500 gavé aux doubles corps pour 160 ch. D’origine Buick, rustique mais fiable, il faisait déjà le bonheur de la Rover P6, du Range Rover et de la MGB GT V8, et permet à la SD1 de dépasser les 200 km/h. Sous la robe, le châssis doit composer avec un essieu arrière rigide et des freins à tambour à l’arrière ! La direction essaye de faire pardonner l’ensemble en optant pour une assistance hyper directe qui offre au train avant un caractère vif et incisif… Malgré la technologie dépassée, Rover affirme que le comportement est du niveau des meilleurs…
Apparemment, ce sera le cas puisque notre magnifique berline anglaise va vite séduire les journalistes qui vont rapidement l’encenser. Les commandes affluent. En 77 elle est élue berline européenne de l’année et histoire de développer l’offre tout en se calquant au marché, les V6 2300 et 2600 font leur apparition. En 82, la SD1 passe en phase 2 avec, au passage, l’arrivée d’un 4 cylindres de 2.0 l, d’un Turbo Diesel et de la version Vitesse qui voit le V8 équipé d’une injection électronique pour développer 193 ch. A partir de 1984 il équipera également les version 3500 Vaden Plas EFI, et tous les autres blocs passeront à l’injection. Après un peu plus de 300.000 exemplaires (Très loin des objectifs de 3000/semaine), elle tire sa révérence en 1986, et laisse sa place à la nouvelle moderne Rover 800 développée en partenariat avec Honda.
Tout ça c’est bien, mais niveau pompelup (Je reviendrai sûrement ultérieurement sur la Vitesse), cette sage et luxueuse berline cache un palmarès de haut niveau. Son V8 bien que dépassé sur la route, offre un beau potentiel en course, surtout qu’on en a déjà fait le tour avec les MG et qu’il offre la fiabilité d’un caterpillar !
Déjà en BTCC à partir de 1980. TWR (Tom Walkinshaw Racing) va lui offrir 6 victoires sur les saisons 80 et 81, puis elle décrochera le titre en 86 grâce au team privé Dennis Leech, devant les BMW 635 CSI officielles. Puis chez nous où elle décroche 2 titres en Championnat de France de voitures de production (Supertourisme) grâce à René Metge en 82 sur une 3500 et Jean-Louis Schlesser en 86 au volant d’une Vitesse. En 85 Rover engage 3 voitures en ETC (European Touringcar Championship), mais l’ère du turbo est arrivée, et la Rover est définitivement mise à la retraite.
Celle qui illustre cet article a couru en Gr2 en Afrique du Sud. Son 3.5 a été reconstruit et préparé par Hesketh, il va chercher sa respiration à 8250 trs/min pour envoyer 400 ch sur les roues arrière. Elle a à son actif les 9h et les 1000 km de Kyalami 81, 82, 83 et 84 aux mains des frères O’Sullivans. Ils l’ont ensuite revendue, elle a continué de courir en historique et après avoir changé de mains à plusieurs reprises, elle a été rachetée par les frères O’Sullivans en 2003 qui l’ont entièrement repeinte dans ses couleurs d’origine.
En 2014, elle a été rachetée par son proprio actuel, un européen qui lui a offert une restauration complète. Depuis, vous pouvez la croiser lors des manches du Heritage Touring Cup. Et croyez moi, entendre les hurlements de son V8 à pleine charge, ça risque de vous marquer à vie !
© Goodwood Road & Racing – CJDone / Photos via signatures éventuelles
Encore une perle inconnu à mes yeux
6 en ligne sur les 2300 et 2600. Pas de V6.