L’Alpine A610 V6 Turbo, c’était la dernière tentative de Dieppe pour essayer de sortir la tête de l’eau. Y’aura pas 36 alternatives, ça passe ou ça casse ! Et la suite, on la connait tous… lancée en 91, elle disparait du catalogue en 95, entrainant avec elle la marque tricolore. Un sombre échec pour un final tout aussi tragique !
Les 90’s ont été fatales pour les GT tricolores, Alpine d’abord, Venturi ensuite. Pourtant, si Venturi était un pur artisan, Alpine appartenait à Renault. On peut s’dire que la marque au losange pouvait garantir une certaine stabilité, en tout cas c’est c’qu’avait négocié Jean Rédélé lorsqu’il a quitté le navire en 1978 alors que Renault s’était engagé à reprendre l’ensemble de l’équipe et d’assurer la sérénité de la marque pendant 15 ans…
Pourtant l’image d’Alpine était plutôt compliquée… sans parler des aficionados de la marque. Pour beaucoup, la véritable Alpine, c’était d’abord et avant tout l’A110. Ok. Mais on ne peut pas faire vivre une marque avec un seul modèle… quoique. En attendant, à partir du moment où une Alpine n’était pas une A110, elle était quasiment condamnée sans même qu’on ne lui laisse la moindre chance. Ce sera le cas de l’A310, puis de la GTA mais aussi de l’A610.
En même temps, quand la marque a arrêté la carrière de sa Berlinette en 77, on a eu l’impression qu’elle n’a alors cessé de courir après son image en faisant des choix qui allaient avoir du mal à être compris, avec l’obsession de devenir le Porsche tricolore en essayant de se positionner sur le marché des GT. Mais voilà, l’Alpine A110, c’était le léger c’est la vérité, en mode sauciflard et calendos ! La marque aurait peut être dû rester dans le chapitre des sportives compactes, légères, vivantes, amusantes et dynamiques plutôt que d’essayer de se transformer en spécialiste de l’Autobahn. Non pas que celles qui vont lui succéder seront ratées, mais elle s’éloigneront peut être trop de l’ADN originel qu’avait voulu Rédélé.
En attendant, les chiffres parlent d’eux mêmes… après 7579 A110 produites, le moral allait être au beau fixe avec 11616 A310 vendues, avant de vite retomber avec une GTA qui se retrouve badgée Renault…! 6494 GTA seront produites et malheureusement l’A610 n’arrangera rien.
Je dis malheureusement car malgré ce déficit d’image et même si leur finition étaient aléatoire, même si le V6 PRV qu’il soit atmo ou turbo n’avait pas le prestige mécanique d’un Flat 6 ou d’un Busso, les Alpine étaient d’excellentes GT et des sportives efficaces…
L’A610 était censée corriger les ratés de la très controversée GTA. Lors de sa présentation en mars 91 au salon de Genève, les critiques sont unanimes, les fans aussi. Le style et le développement de la voiture ont été confié à Berex, le bureau d’étude interne.
La structure ne change pas, l’A610 est fidèle au châssis poutre avec le plancher fixé sur des caissons renforceurs avant que la carrosserie en fibre ne soit collée, une technique qui assure légèreté et rigidité, si ce n’est que depuis l’A108, la marque s’est embourgeoisée. Puisque la GT accuse 1410 kg sur la balance. Les trains roulants sont à double triangulation maintenus par des combinés ressorts / amortos. Et l’ensemble est posé sur des jantes en 16″ chaussées de Michelin MXX de 205/45 et 245/45.
L’avant est volontairement chargé et renforcé afin d’améliorer la tenue de cap (défaut de la GTA) et de rattraper le poids du V6 PRV positionné juste derrière les roues arrière pour sortir une répartition avant/arrière de 43/57, de quoi offrir à l’A610 une motricité sans faille, un comportement sportif et efficace sans pour autant sacrifier le confort. Le gazier shooté par un turbo Garrett T3 qui souffle à 0,76 bars, envoie 250 ch et 350 Nm aux roues arrière. De quoi envoyer la GT tricolore à 100 km/h en moins de 6 secondes, de passer la barre des 400 m en 13,9 et celle du kilomètre en 24,9 avant de filer à 265 km/h. De quoi aller chauffer les Porsche 964, Lotus Esprit, Honda NSX, Nissan 300ZX, Ferrari 348 et autres.
L’A610 était séduisante, efficace, bien équipée, moins chère que ses concurrentes, plébiscitée par la presse spécialisée… mais pourtant, elle ne se vendra pas. De 91 à 95, il ne s’en écoulera que 818 exemplaires, dont cet exemplaire de 1992, chaussé en 17″ et équipé de phares fixes sous plexy.
On en revient au début de cet article… une bonne bagnole, une vraie sportive, mais un déficit d’image. Puis Renault, n’est pas Porsche… D’autant plus qu’Alpine a quitté les circuits et les spéciales depuis un petit moment déjà. Et l’engagement d’une A610 GT2 aux 24h du mans 94, avec une 13ème place au général et la 5ème place de sa catégorie (derrière 3 Porsche 911 RSR et une Ferrari 348 GTC LM mais devant les NSX et les Venturi), n’y changera rien.
Au bout de six mois il ne s’est vendu qu’une soixantaine d’A610… et encore, la majorité se sont vendues en Allemagne et en Angleterre ! Renault va alors tenter de miser sur les séries limitées, elle lance l’Albertville 92, en référence au partenariat avec les jeux olympiques d’hiver… il s’en vendra 2 ! Un peu plus tard, 31 A610 Magny-Cours trouveront preneurs. En 93, Alpine assemble un proto A610 Evolution avec un V6 boosté à 280 ch… le projet est finalement abandonné, tout comme celui d’une A610 cabriolet.
En 95, Renault stoppe l’hémorragie. La production de l’A610 s’arrête et Alpine disparait au profit de Renault Sport, même si beaucoup y ont cru jusqu’au bout en pensant que le Spider serait badgé du A. Mais ceci est une autre histoire…
Bonjour, de mémoire, il existerait trois Albertville, finalement… Une en Hollande. Au plaisir.
Superbe exemplaire d’illustration. Dans une couleur originale en plus.
J’espère que l’histoire ne se répétera pas, mais je crois que l’on en prend le chemin, pas pour les mêmes causes, mais avec les mêmes effets!!!